Association Française de Sociologie réseau thématique 31 - Tag - FootballAssociation Française de Sociologie réseau thématique 312015-09-01T14:11:36+02:00urn:md5:be7caa8dfa753e48ccb3228028ea71fbDotclearLes enjeux socioculturels de la pratique sportive féminine en Tunisie. Cas du football fémininurn:md5:0b8a96945b4a96be4070874c91805e1a2010-02-08T10:06:00+01:002011-03-29T08:46:45+02:00adminControversesfemmesFootballSociologie des pratiques et des pratiquants<p>Auteur : Ben Jannet Zouheir</p>
<p class="spip">En Tunisie, le sport féminin a connu durant les vingt
dernières années une évolution sans précédente. En effet, le nombre des
licenciées appartenant aux différentes fédérations sportives tunisiennes
est passé de moins de 2 milles en 1994 à 27 milles en 2007. Le nombre
des footballeuses et des clubs de football féminin ne cesse à son tour
d’augmenter d’une année à une autre.</p>
<p class="spip">Toutefois, et sachant qu’elle est expliquée le plus
souvent par les efforts déployés par l’Etat, et non par une dynamique
socioculturelle favorisant l’accès de la femme à certains champs sociaux
considérés auparavant comme étant des espaces d’action et de
négociation sociales qui ne concernent que les hommes, cette évolution
n’a pas pu jusqu’au présent changer les représentations du sport et du
football en particulier chez la femme tunisienne. Cette dernière se voit
jusqu’à nos jours « incapable » de se placer au centre du paysage
sportif et surtout celui du football au même titre que l’homme.</p>
<p class="spip">Ainsi, et juste à titre d’exemple, on remarque que la
présence de la femme dans le paysage sportif tunisien est beaucoup plus
ressentie dans le cadre des sports individuels (gymnastique, natation,
danse, etc) que dans le cadre des sports collectifs (football,
basket-ball, etc). On remarque également que plus les activités
physiques et sportives sont institutionnalisées, officialisées et
médiatisées, plus la femme s’engage moins. Ceci est sans doute en
relation avec la culture traditionnelle qui fait de la femme plutôt un
« être domestique » qu’un « être public » et qui oblige cette dernière
de se limiter aux pratiques sportives socialement défavorisées.</p>
<p class="spip">C’est dans ce sens, peut être, qu’on peut dire que la
pratique du football féminin en Tunisie répond beaucoup plus à une
politique officielle visant la promotion du sport féminin en général,
qu’à une volonté féminine de pratiquer ce type de sport et de dépasser
le système socioculturel selon lequel les activités physiques et
sportives sont distribuées très inégalement entre les deux sexes.</p>
<p class="spip">Après avoir présenter les principales mesures mises en
œuvre par l’Etat tunisien en matière de promotion du sport féminin en
général et du football en particulier, le présent article aura
l’ambition de comprendre l’apport de ces mesures dans le processus
d’intégration de la femme dans le domaine du football. Il vise également
à connaître les différents enjeux d’ordre socioculturel de la pratique
féminine du football et les obstacles empêchant la femme de pratiquer ce
genre de sport.</p> 1. La promotion du sport féminin en Tunisie<div class="texte">
<p class="spip">Si le sport est par définition l’ensemble des activités
physiques et corporelles institutionnalisées, les sociologues n’ont pas
cessé jusqu’à nos jours d’affirmer que la codification et
l’institutionnalisation des activités physiques ne doivent être
comprises que dans leur rapport avec le processus de rationalisation et
de modernisation qu’avaient connue l’humanité dans son histoire et
l’essor du nouveau mode d’organisation politique, économique et
culturelle moderne dans lequel l’Etat est devenu l’acteur principal.
Toutefois, et même si l’objectif réel de la parution du sport moderne en
Europe depuis le 16ème siècle a fait l’objet d’un débat assez riche
entre les sociologues (1) , le sport, et surtout le football, est devenu
depuis la deuxième guerre mondiale, et partout dans le monde, un moyen
très sollicité pour changer les sociétés et vulgariser les nouvelles
valeurs politiques, économiques et culturelles(2).</p>
<p class="spip">1.1. Rôle de l’Etat et principales caractéristiques</p>
<p class="spip">En Tunisie, où l’Etat moderne s’est déclaré le lendemain
de l’indépendance comme l’unique acteur de changement et de
modernisation des structures sociales traditionnelles, le sport a été
l’une des principales nouvelles institutions au sein desquelles a été
construite une identité nationale portée sur la rationalisation, la
modernité et l’ouverture sur l’extérieur. Durant les vingt dernières
années, le sport continue à être l’un des principaux canaux de
transmission et de diffusion du message politique(3) . Cependant, et si
les exploits sportifs nationaux et internationaux ont servi durant la
première période de l’indépendance (1956-1987) à rappeler les tunisiens
de leur unité et de leur nouvelle identité(4) , il ont servi dans la
deuxième période (depuis 1987) de témoignage du succès du nouvel Etat et
ses réalisations dans les différents domaines sociaux (sport, loisir,
droits de l’homme …etc.).</p>
<p class="spip">Ceci étant, l’accès progressif de la femme durant les
dernières années au paysage sportif est présenté toujours comme étant le
fruit d’un grand effort déployé par l’Etat dans la promotion de la
femme en général. Le discours politique ne cesse de rappeler
périodiquement le monde des acquis de la femme tunisienne sous le
nouveau régime et de ses réalisations dans les différents secteurs dont
celui du sport. En effet, le renforcement de la présence féminine dans
les différentes catégories et disciplines sportives collectives aussi
bien qu’individuelles a été déclaré depuis plus de dix ans comme choix
stratégique de la politique du changement en Tunisie(5) . La femme
tunisienne est présentée comme étant capable à contribuer à
l’enrichissement du palmarès sportif du pays et à atteindre les plus
hauts niveaux de la distinction et de l’excellence.</p>
<p class="spip">L’intérêt accordé par l’Etat au sport féminin s’est
traduit par plusieurs mesures d’encouragement décidées en sa faveur dont
essentiellement : la prise en charge des frais d’adhésion des
associations sportives féminines aux différentes fédérations nationales,
la gratuité des entraînements et des compétitions dans les
installations sportives, la réservation d’une part de 10% des recettes
du fonds national de promotion du sport aux activités féminines, le
renforcement de la présence de la femme dans les différentes structures
de gestion et d’administration sportives et surtout au sein des bureaux
fédéraux (20% du nombre total des membres) …etc.(6).</p>
<p class="spip">Ces mesures ont assuré une présence effective dans la
quasi-totalité des domaines sportifs. L’un des indicateurs qui peut nous
renseigner sur la place de la femme dans le paysage sportif actuel est
le nombre des licenciées dans les différentes disciplines sportives. En
effet, ce nombre est passé de 9 milles en 1999 à 21 milles en 2004 et à
29 milles en 2008. Le nombre des clubs sportifs féminins ne cesse à son
tour d’augmenter avoisinant aujourd’hui les 70 clubs(7) .</p>
<p class="spip">Au niveau des performances, l’élite sportive féminine a
récolté 42% du total des médailles remportées par les sélections
nationales au cours des dernières manifestations sportives, alors qu’au
cours des derniers jeux méditerranéens de Pescara 2009, les sportives
tunisiennes ont décroché près de 50 % du nombre total des médailles (37
médailles). La femme tunisienne a également conquis d’autres spécialités
qui ont été exclusivement réservées aux hommes, tels que la boxe, le
rugby, la pétanque et le culturisme(8) .</p>
<p class="spip">Néanmoins, et si les résultats atteints par les
sportives tunisiennes font sans doute preuve d’un intérêt particulier
accordé par l’Etat à l’amélioration de la situation de la femme en
général, il est ici lieu de souligner que l’accès de cette dernière aux
différentes activités sportives varie clairement d’une région à une
autre. En effet, plusieurs indices statistiques nous montrent que
l’intervention de l’Etat en matière de promotion des pratiques sportives
féminines n’a pas pu jusqu’au présent assurer à la femme dans plusieurs
régions du pays une place plus importante dans le paysage sportif
actuel. Nous avons constaté également que le sport reste encore une
faveur au profit de certaines catégories de femmes et spécialement
celles qui habitent dans les grandes villes du pays comme Tunis, Sousse
et Sfax(9).
Cette forte inégalité dans la répartition des pratiques sportives
féminines entre les régions du pays montre clairement que l’accès de la
femme au sport aboutit beaucoup plus à une logique d’intervention et de
mobilisation politique qu’à une dynamique socioculturelle interne. Il
n’est pas difficile de constater, par conséquent, que les régions dans
lesquelles les sports sont devenus plus accessibles pour la femme, sont
également celles qui ont reçu la part la plus grande des interventions
étatiques en matière du développement trop souvent considérées comme
stimulant de changement et de modernisation et dans lesquelles la femme
avait déjà commencé depuis quelques années de prendre une place plus
importante dans plusieurs champs publics à savoir l’enseignement et le
travail.</p>
<p class="spip">Quant aux autres régions de l’intérieur tunisien
caractérisé par un niveau de développement économique et social moins
important que le reste du pays, et malgré que l’Etat ne cesse durant les
dernières années d’y alourdir ses interventions dans les différents
domaines, il paraît clairement que le sport reste jusqu’au présent un
champ social masculin. Ainsi, et juste à titre d’exemple, on peut noter
que le nombre des licenciées dans les clubs sportifs du grand Tunis
comptant selon le dernier recensement (2004) presque 22% du total de la
population tunisienne dépasse les 45% du total des licenciées dans tout
le pays. Sousse et Monastir, les deux grandes villes du sahel comptent
presque 15% de ce total par contre dans les trois villes du nord ouest
Le Kef, Jendouba et Béja représentant presque 12% de la population
totale on ne compte que 849 licenciées soit 3% de l’effectif national.
La région du Sud Ouest (Gafsa, Tozeur et kébili) ne fait pas, non plus,
l’exception avec plus de 560 milles habitants (soit donc 6%). Seuls, en
effet, 249 femmes pratiquent des activités sportives dans les clubs de
la région soit environ 1% de l’effectif national des licenciées(10) .</p>
<p class="spip">1.2. Bref aperçu général sur le football féminin en Tunisie</p>
<p class="spip">En Tunisie, comme partout dans le monde, le sport a été
depuis longtemps dominé par l’homme. Il n’est même pas difficile de
remarquer que certaines pratiques sportives comme la boxe, le cyclisme,
le rugby, le football …etc, ont été réservées uniquement pour l’homme et
les femmes en ont été totalement exclues. Ceci revient en quelques
sortes au fait que les pratiques masculines sont généralement connues
par leur force, violence et virilité dépassant les qualités et les
aptitudes des femmes telles qu’elles sont définies socialement.</p>
<p class="spip">Dans un tel contexte où la féminité était toujours vue
comme synonyme de sensation, de finesse et de timidité, le football
féminin n’a pas vu le jour en Tunisie, le pays qui était considéré
toujours comme avant-gardiste des droits de la femme, que depuis
quelques années. Les premières compétitions ont été organisées d’abord
au sein des écoles et puis sous forme de tournois entre les instituts
supérieurs du sport et d’éducation physique. Quelques années plus tard
et officiellement en 2004 la Fédération tunisienne de football a lancé
le premier championnat de football féminin. Outre les épreuves du
championnat amateur, organisées chaque saison pour tous ses affiliées
en Football Féminin, la Fédération organise également, et à partir de la
saison 2004-2005 une épreuve nationale de Coupe du Football Féminin
pour chaque catégorie d’âge.</p>
<p class="spip">Toutefois, et paradoxalement à la volonté de l’Etat de
promouvoir le football féminin, manifestée dans le discours officiel des
différentes structures d’appui et de gestion de cette pratique sportive
(le ministère, la Fédération, la presse officielle, etc), les
différentes compétitions organisées par la Fédération ne sont que très
peu médiatisées. De ce fait, et contrairement au football masculin qui
représente aujourd’hui l’un des sports de spectacle les plus fructueux
pour le vedettariat et la richesse, le football féminin reste encore un
domaine qui n’attire pas l’attention des tunisiens que ce soit en
matière de pratique ou en matière de supportérisme(11) . Appartenant à
une activité très marginalisée dans le paysage médiatique, les
pratiquantes sont d’ailleurs encore trop loin du professionnalisme, des
transferts, des affaires et de la publicité.</p>
<p class="spip">Ceci est sans doute en relation avec les représentations
sociales du football chez les tunisiens considérant toujours cette
pratique sportive comme pratique masculine et empêchant réellement
l’émergence d’un champ footballistique féminin. Bien sûr, de telles
représentations ne pourraient qu’influencer négativement l’accès des
jeunes filles au football. Le nombre des licenciées dans les différents
clubs de football féminin du pays ne dépassant guère les 1080 filles en
2007, soit environ le 1/3 du nombre des licenciées du handball par
exemple, prouve sans doute cette constatation.</p>
<p class="spip">2. Enjeux et obstacles socioculturels de la pratique féminine du football</p>
<p class="spip">Etant donné que le sport en général est considéré
socialement comme l’apanage de l’homme, la pratique du football met sous
enjeux non uniquement la féminité et l’image de la femme, mais aussi
son statut et ses rôles dans les différents champs sociaux. Plus
généralement, et comme lieu de socialisation, le sport et plus
particulièrement le football, peut sans doute jouer un rôle très
important dans la construction d’une nouvelle identité féminine(12) .</p>
<p class="spip">2.1. L’enjeu de la féminité</p>
<p class="spip">Bien que, dans les différentes approches sociologiques,
le féminin et le masculin sont toujours considérés comme étant le fruit
des constructions sociales du sexe et non pas comme différence
biologique(13) , la féminité ne peut être étudiée sociologiquement, à
notre avis, qu’à travers une conception dynamique du genre qui met en
compte l’effet du processus de changement social global dans lequel
toute société est intégrée, sur la construction et la reconstruction des
identités sexuées.</p>
<p class="spip">Dans une telle perspective d’analyse, le degré
d’intégration de la femme aux différentes pratiques sportives est
déterminé sans doute en fonction des représentations sociales du féminin
et du masculin. C’est dans ce sens que nous voyons que la femme
tunisienne met, en pratiquant le football, sa féminité en question.
Cette féminité, liée à un système de valeurs qui détermine ses
possibilités et ses limites, est l’un des facteurs selon lesquels des
pratiques sportives sont considérées comme pratiques masculines et
d’autres sont considérées comme pratiques féminines. Deux registres
sémantiques illustrent d’ailleurs les différences entre les deux types
de pratiques. Les premières sont synonymes de virilité, de force,
d’agressivité et de fort engagement physique par contre les deuxièmes
s’attachent plutôt à la souplesse, la finesse, la douceur et la
fragilité.</p>
<p class="spip">A ce titre, l’idée que le football est une affaire
d’homme, fortement partagée par les tunisiens et les tunisiennes, rend
la pratique de cette activité par la femme de plus en plus difficile(14)
. Cette idée est traduite par plusieurs femmes interviewée à ce propos
insistant sur la virilité du football : « je ne vois pas que le corps de
la femme pourrait s’adapter avec le degré d’agressivité, de violence et
de résistance sollicité dans les matchs de football que nous suivons
chaque semaine à la télé. Je ne vois également pas que ça va apporter
quelques choses de valeur pour la femme, bien au contraire, la pratique
du football risque de lui faire perdre sa féminité, sa beauté, son
élégance, sa timidité et tout ce qui la distingue de l’homme », déclare
l’une des interviewée à ce propos.</p>
<p class="spip">La pratique du football par la femme signifie ainsi le
passage d’un corps faible, timide et vulnérable à un corps fort,
agressif et « courageux ». De telles idées peuvent sans doute obliger la
femme de s’auto exclure du champ footballistique dans le souci de
protéger sa féminité définie non uniquement comme position de genre mais
aussi comme étant un système de pratiques sociales et corporelles.
Celle qui pratique le football est le plus souvent considérée comme ni
femme ni homme. Walid, un jeune sportif de 26 ans nous dit ainsi :
« lorsque j’était enfant, je me souvient bien d’une fillette qui
pratiquait avec nous le football de la rue, nous l’avons attribué le nom
de Slouma à la place de son nom réel « Selma » mais petit à petit elle
s’est trouvée exclues des deux sexes. Aujourd’hui cette fille, je la
connaît très bien, trouve des difficultés énormes dans ces relations
aussi bien avec les filles qu’avec les garçons, je ne pense pas
d’ailleurs qu’elle va se marier ».</p>
<p class="spip">A ce point, et dans un tel contexte où les pratiques
sportives sont déterminées en fonction des sexes, la pratique du
football peut engendrer des problèmes majeurs pour la femme. Elle
pourrait même être considérée comme signe de déréglementation et
d’abolition de l’ordre masculin – féminin maintenu par la distance qui
sépare ses deux pôles l’un de l’autre. La passivité, le désencouragement
et parfois le refus de la pratique féminine du football manifestés par
certains hommes se voient ainsi comme étant des moyens de protection de
soi et de défense de leurs intérêts et privilèges sociaux leurs
attribuant une sorte de supériorité naturelle très liée aux qualités
physiques de l’homme. Sirine, étudiante et l’une des licenciées d’un
club de football féminin dans la ville de Gafsa, considère
l’environnement social très masculinisé comme premier obstacle pour le
développement de cette activité : « contrairement aux encouragements de
l’Etat, de nos dirigeants du club et parfois de nos familles, nous
vivons réellement tout le temps ou presque sous des pressions énormes.
Lors des matchs, les quelques spectateurs présents ne s’occupent que
très rarement du jeu, ce sont plutôt nos corps, nos jambes, nos
poitrines … etc qui attirent leurs regards, nous écoutons tout au long
des matchs des expressions qui nous dénigrent et nous déféminisent. Je
veux demander seulement aux hommes qu’il ne viennent jamais nous
supporter, pas plus qu’ils nous laissent jouer le football ».</p>
<p class="spip">Voilà donc comment le football féminin pose des
questions nouvelles à la femme et à la société. L’une des questions les
plus angoissante, à l’égard des femmes aussi bien qu’à l’égard des
hommes, est la question de féminité attachée depuis longtemps à un
système de comportements et de pratiques qui l’éloignent de l’homme.
Ainsi, la pratique d’une activité sportive connue socialement comme
l’apanage des hommes, mettant la femme sous le risque de perdre sa
féminité, devient-il un véritable obstacle devant des affaires aussi
éternelles que le mariage et la maternité. Le témoignage de Monsieur
Ridha, père de deux filles, illustre bien cette situation :
« personnellement, je n’arrive pas à imaginer ma femme ou ma fille
pratiquer le football, c’est vraiment dangereux pour la femme, cette
pratique tolérante d’un degré de violence et d’agressivité très élevé
est sans aucun doute une pratique masculine pas ou peu compatible avec
le corps de la femme qui est fragile par nature. D’ailleurs, et même si
quelques femmes ont pu montré une certaine aptitude physique à le faire,
je ne pense pas que cette agressivité se conviendrait avec ses
responsabilités d’avenir comme fille, épouse ou mère »</p>
<p class="spip">2.2. L’enjeu de l’identité</p>
<p class="spip">S’agissant de la conscience que l’on a de soi même dans
son rapport avec l’autre, l’identité ne peut être étudiée
sociologiquement que dans des perspectives de tout un processus
interactif infini entre l’individu et les différents champs sociaux.
Elle est ainsi conçue à travers une négociation permanente entre divers
cadres et expériences(15) et est fortement liée au système de
comportements individuels et de pratiques collectives caractérisant le
contexte social dans lequel l’individu est inscrit.</p>
<p class="spip">La pratique du football féminin se voit en ce sens non
uniquement comme choix sportif, mais plutôt l’un des moyens par lesquels
la femme avait commencé à construire une nouvelle identité féminine.
L’enquête qualitative que nous avons menée auprès de quelques
footballeuses nous a montré que cette construction est faite le plus
souvent à travers deux processus d’élaboration identitaire : la rupture
avec l’image traditionnelle de la femme permettant de reconstruire son
identité personnelle renvoyant à ce qu’elle a d’unique ou à son
individualité, et la reconstitution du champ sportif dans lequel la
femme, et à travers la pratique de nouvelles activités sportives, va
prendre un nouveau statut qui lui permet de redéfinir son identité
sociale et renvoie à toute une réalité sociale nouvelle.</p>
<p class="spip">Ainsi, nous pouvons comprendre pour quelle raison l’un
des principaux objectifs visés par la pratique du football de la part de
la femme est « la recherche de différence ». Certaines femmes
conçoivent la pratique du football comme étant une manière nouvelle de
« savoir être » qui les rapproche de l’homme, certes, mais aussi qui les
éloigne d’une image traditionnelle de la femme. Cette différenciation /
identification correspond à un processus de reconstruction identitaire
qui comporte une relation positive d’inclusion et une relation négative
d’exclusion(16). Le témoignage de l’une des pratiquantes à ce propos
confirme clairement le souci identitaire : « j’aime cette pratique parce
qu’elle demande un grand engagement physique et moral rarement
manifesté par la femme dans sa vie quotidienne, le football n’est pas
fait uniquement pour les hommes mais aussi pour certaines femmes qui
peuvent manifester, en cas de besoin, un degré maximum d’agressivité, de
violence et même de virilité ».</p>
<p class="spip">Ce désir d’être une femme différente ne pouvant être
accompli aujourd’hui par l’enseignement, ni par le travail, oblige la
femme de choisir des milieux d’engagement et d’auto investissement
inhabituels dont le football. Le football comme porteur de nouvelles
valeurs physiques et culturelles, se présente ainsi comme le moyen par
lequel certaines femmes manifestent de nouvelles aptitudes comme
l’agressivité, la force et la prise de risque etc.</p>
<p class="spip"> Conclusion</p>
<p class="spip">Dans cet article, nous avons analysé le processus
d’intégration de la femme tunisienne dans le champ du football à deux
niveaux : le rôle de l’Etat dans la promotion du sport féminin en
général et l’apport des principales mesures d’encouragement dans le
développement du football féminin en particulier d’une part, et les
principaux enjeux et obstacles socioculturels et socio identitaires de
la pratique féminine du football d’autre part.
Cette analyse a montré que le football reste encore une activité
marginale dans le paysage sportif global malgré l’importance des mesures
prises par l’Etat pour la promotion de cette pratique sportive. Cette
marginalisation est liée à un système de représentations sociales de la
féminité faisant du football une activité physique et corporelle ne
pouvant être conjuguée qu’au masculin. Les principaux obstacles
empêchant le progrès de cette pratique sont ainsi d’ordre socioculturel.</p>
<p class="spip">Notes</p>
<p class="spip"> 1. Norbert Elias, tout en insistant sur l’importance
des transformations sociales dans la naissance des sports modernes
définit le sport comme étant « un combat physique non violent qui est né
à un moment où la société connaissait des transformations
inhabituelles : les cycles de violences ralentissaient et les conflits
d’intérêt et de croyance trouvaient une solution de sorte que les deux
principaux prétendants au pouvoir, mais par des moyen conformes à des
règles ». Pour Bourdieu, c’est le capitalisme qui a crée le sport pour
permettre aux classes ouvrière pour s’épanouir. Voir Norbert Elias et
Eric Dunning « Sport et civilisation, la violence maîtrisée » Fayard,
Paris 1986 (P34) et Pierre Bourdieu : comment peut-on être sportif ?
In ; Questions de sociologies. Cérès éditions, Paris 1984.</p>
<p class="spip">2. Il est ici à rappeler de la thèse du sociologue
Français Jean Marie Brohm mettant l’accent sur l’importance du sport
dans la mobilisation des peuples au profit des objectifs politiques. Le
rôle du sport dans les régimes politiques totalitaires comme le Nazi et
le Communisme Stalinien justifie l’idée de Brohm que le sport est un
nouvel Opium du peuple qui sert de moyen pour masquer les paradoxes du
capitalisme moderne et pour détourner les gens de la misère de leur vie.
Jean Marie Brohm, Sociologie politique du sport, PUN, 1977. Toutefois,
et si l’on stigmatise souvent l’usage du sport par les régimes
politiques totalitaires, il n’est pas difficile de constater que le
sport représente aujourd’hui une composante essentielle des stratégies
de mobilisation et de rayonnement politique utilisées par les différents
Etats du monde dont ceux dits « démocratiques ».</p>
<p class="spip"> 3. Abbassi Driss, 2007, « Sport et usages politiques du
passée dans la Tunisie des débuts du XXI ème siècle », Politique et
Sociétés, vol.26, n°2-3, 2007. p.p. 125-142</p>
<p class="spip"> 4. Rappelons ainsi du champion olympique des années 60
Mohamed Gammoudi présenté par l’Etat comme étant un exemple concret de
la réussite de la nouvelle nation tunisienne portée sur la modernité et
l’ouverture sur le monde. Dans le discours politique d’aujourd’hui,
Oussama Mellouli, le champion olympique des dernières années, témoigne
plutôt des acquis et des réalisations de la jeunesse tunisienne sous le
nouveau régime politique.</p>
<p class="spip"> 5. Au cours de la célébration de la journée nationale
du sport et de l’esprit olympique le 4 juillet 1997, le président de la
république annonce dans son discours que « l’intérêt se portera tout
particulièrement, durant l’étape à venir, sur les sports individuels et
le sport féminin ». Trois ans plus tard, il déclare que « tout en
constatant avec satisfaction que la présence de la femme tunisienne ne
cesse de se consolider dans les différentes associations, organisations
et structures, nous n’en estimons pas moins indispensable d’accorder un
intérêt accru aux associations sportives féminines, de promouvoir leurs
activités et de les doter des cadres éducatifs et des compétences
techniques nécessaires ».</p>
<p class="spip">6. Tarek Gharbi, « Les instruments de la promotion du sport ». Le renouveau, 23 novembre 2009.</p>
<p class="spip">7. Ministère de la jeunesse, du Sport et de l’Education
Physique. Portail du sport en Tunisie.
http://www.sport.tn/fo/fr/global.php ?menu1=12</p>
<p class="spip">8. Agence Tunis Afrique Presse, « Le sport féminin : une
présence active au sein du paysage sportif tunisien ». Actualités
politiques, économiques, culturelles et sportives de la Tunisie.
http://www.tap.info.tn/fr</p>
<p class="spip">9. Ministère de la jeunesse, du Sport et de l’Education Physique, Portail du sport en Tunisie. op.cit</p>
<p class="spip">10. Ibid.</p>
<p class="spip">11. Les matches de football féminin sont joués le plus souvent devant des gradins vides de supporters</p>
<p class="spip">12. Pour rendre compte des divers enjeux socioculturels
de la pratique féminine du football, nous avons mené une série
d’entretiens semi directifs auprès de quelques hommes et femmes de la
ville de Gafsa au sud ouest de la Tunisie. Des entretiens libres ont été
menés auprès de quelques footballeuses de l’Association du Sport
Féminin de Gafsa ayant pour objectif la compréhension des logiques et
des enjeux identitaires selon lesquels sont déterminés les degrés
d’acceptation et d’intégration de la femme à la pratique du football.</p>
<p class="spip">13. Marie-Stéphanie Nnémé, « les femmes dans le
football : enjeu et mise en jeu des identités de genre ». Les carnets
des STAPS. N°5. 2008. p 46</p>
<p class="spip">14. Fethi Tlili : « Statut féminin, modèle corporel et pratique sportive en Tunisie ». STAPS. N°57. 2002..</p>
<p class="spip">15. Marie-Stéphanie Nnémé, « les femmes dans le football : enjeu et mise en jeu des identités de genre ». Op, cit,p52</p>
<p class="spip">16. Elisabeth Badinter, XY de l’identité masculine, Odile Jacob, Paris. 1992. P56</p>
<p class="spip">Bibliographie</p>
<p class="spip"><img class="spip_puce" src="http://netx.u-paris10.fr/afsrt31/puce.gif" alt="-" border="0" /> Badinter Elisabeth, XY de l’identité masculine, Odile Jacob, Paris. 1992.
<br /><img class="spip_puce" src="http://netx.u-paris10.fr/afsrt31/puce.gif" alt="-" border="0" /> Bourdieu Pierre (1984), comment peut on être sportif ? In ; Questions de sociologies. Cérès éditions, Paris
<br /><img class="spip_puce" src="http://netx.u-paris10.fr/afsrt31/puce.gif" alt="-" border="0" /> Brohm Jean Marie(1977), Sociologie politique du sport, PUN
<br /><img class="spip_puce" src="http://netx.u-paris10.fr/afsrt31/puce.gif" alt="-" border="0" /> Driss
Abbassi, 2007, « Sport et usages politiques du passée dans la Tunisie
des débuts du XXI ème siècle », Politique et Sociétés, vol.26, n°2-3,
2007
<br /><img class="spip_puce" src="http://netx.u-paris10.fr/afsrt31/puce.gif" alt="-" border="0" /> Elias Norbert et Dunning Eric, (1986) Sport et civilisation, la violence maîtrisée » Fayard, Paris
<br /><img class="spip_puce" src="http://netx.u-paris10.fr/afsrt31/puce.gif" alt="-" border="0" /> Gharbi Tarek, Les instruments de la promotion du sport. Le renouveau, 23 novembre 2009.
<br /><img class="spip_puce" src="http://netx.u-paris10.fr/afsrt31/puce.gif" alt="-" border="0" /> Le Breton David, (1992), La sociologie du corps, édition Que sais-je, PUF
<br /><img class="spip_puce" src="http://netx.u-paris10.fr/afsrt31/puce.gif" alt="-" border="0" /> Nnémé
Marie-Stéphanie, « les femmes dans le football : enjeu et mise en jeu
des identités de genre ». Les carnets des STAPS. N°5. 2008.
<br /><img class="spip_puce" src="http://netx.u-paris10.fr/afsrt31/puce.gif" alt="-" border="0" /> Thomas Raymond, (2002), Sciences humaines appliquées au sport, 40 thèmes, Paris, Vigot,
<br /><img class="spip_puce" src="http://netx.u-paris10.fr/afsrt31/puce.gif" alt="-" border="0" /> Tlili Fethi : « Statut féminin, modèle corporel et pratique sportive en Tunisie ». STAPS. N°57. 2002.</p>
</div>Les instances de formation dans le football professionnel français : quelle(s) logique(s) de fonctionnement ?urn:md5:ad45ba0447bfdb8577454102f1c73d2c2009-03-08T16:59:00+01:002011-03-07T17:02:45+01:00adminSessions internes au RT 312009Football<p>Auteur : Hugo Juskowiak</p>
<p>La présente proposition de communication tente de
renseigner l’axe général proposé par le RT31 pour le congrès de 2009. Le
travail que je mène dans le cadre d’un doctorat en sociologie du sport
concerne l’efficience de la formation des footballeurs professionnels
dans la région Nord / Pas-de-Calais - la région constitue un bassin
historique de l’implantation du football moderne, « une terre de
football » [<a href="http://netx.u-paris10.fr/afsrt31/article.php3?id_article=126#nb1" name="nh1" class="spip_note">1</a>]
. Le poids historique se double d’un critère de représentativité : la
ligue Nord Pas-de-Calais représente la quatrième ligue national en terme
de licenciés pour la saison 2008 - 2009 (troisième ligue la saison
précédente). Elle dispose également de plusieurs clubs professionnels
(Lens, Lille, Valenciennes, Boulogne) et amateurs de haut niveau
(Wasquehal, Dunkerque, Avion, Calais). En ce sens, cette communication
se situe même à mi-chemin entre le RT31 et le RT23 puisque s’articulant
autour de la notion d’accès au métier de footballeur. Pour autant,
compte tenu de l’avancement des mes recherches, il ne sera ici question
d’une première tentative de quantification et de qualification des
diverses structures en charge de la construction des élites
footballistiques.</p> <div class="texte">
<p class="spip"><em class="spip">Le centre de formation du club professionnel : voie unique pour devenir professionnel ?</em></p>
<p class="spip">Les croyances populaires ainsi que les récurrentes
histoires journalistiques font souvent état de la toute puissance des
centres de formation des clubs professionnels pour mener à bien une
carrière de très haut niveau. Cela pourrait être doublement justifié.
Premièrement à partir du discours de certains praticiens. Ainsi,
Jean-Michel Vandamme, directeur du centre de formation du LOSC,
répondait par l’affirmative à la question que posait le titre de son
intervention lors du troisième colloque international « football et
recherches » de l’Université de Valenciennes en mai 2008 : « Est-il
indispensable de passer par un centre de formation pour réussir une
carrière de footballeur professionnel ? ». Deuxièmement, cela pourrait
se justifier au regard des statistiques concernant les effectifs insérés
dans la formation au métier de footballeur. Voici quelques chiffres
questionnant directement l’efficience des structures de formation et
permettant de prendre conscience de la difficulté et de la rareté de
l’accès au statut de footballeur professionnel : 25 000 joueurs de moins
de 15 ans dans des filières d’accès au haut niveau sur 148 000
licenciés dans cette catégorie d’âge ; le ratio des futurs
professionnels est de 1 sur 6. Il chute à 1 sur 60 en ce qui concerne
les moins de 18 ans (3000 jeunes dans les sections scolaires ou les
centres de formation pour 172 000 licenciés de moins de 18 ans). Ce même
ratio est proche de 1 sur 500 lorsque l’on compare l’effectif
professionnel (1074 joueurs en 2007) à la totalité des licenciés senior.
Deux paliers semblent donc décisifs dans l’accès au plus haut niveau :
l’entrée en centre de formation et la signature du premier contrat. Pour
autant, ces deux moments clés ne semblent être que des révélateurs de
compétence- ou plutôt de non compétence dans le cas présent - qui ne
contiennent pas en eux mêmes toutes les raisons de la réussite ou de
l’échec du joueur. Ces deux moments constituent en réalité plutôt des
rites d’institution intégrés dans un fonctionnement plus large dans le
sens où ils constituent des dispositifs permettant de révéler des
dispositions tout en mettant le jeune aspirant en conformité avec les
membres du groupe de référence.</p>
<p class="spip"><em class="spip">Une multiplicité de structures pour devenir footballeur professionnel</em></p>
<p class="spip">Malgré ce triple argument sur la toute puissance des centres de formation, les premiers entretiens exploratoires [<a href="http://afsrt31.u-paris10.fr/index.php?post/2009/03/08/Les-instances-de-formation-dans-le-football-professionnel-fran%C3%A7ais-%3A-quelle%28s%29-logique%28s%29-de-fonctionnement#nb2" name="nh2" class="spip_note">2</a>]
font état, de manière récurrente, de parcours biscornus, diversifiés
pour atteindre le plus haut niveau. La plupart des acteurs interrogés
font ainsi référence au parcours atypique de Franck Ribery, exclu dans
un premier temps du centre de formation de Lille, il rebondit ensuite
successivement à Boulogne, Alès, Brest, Galatasaray, Marseille et
Munich, où il s’impose comme l’un des meilleurs internationaux français.
Si l’objectif du travail de thèse est de comprendre comment l’on ne
devient pas professionnel, il convient dans un premier temps de mettre à
plat l’ensemble des structures impliquées dans la production de
l’excellence footballistique. Erving Goffman disait « Pour comprendre la
différence, ce n’est pas le différent qu’il convient de regarder, mais
bien l’ordinaire. La question des normes sociales demeure certes au
centre de l’étude, mais notre intérêt ira moins à ce qui s’écarte
extraordinairement du commun qu’à ce qui dévie communément de
l’ordinaire » [<a href="http://afsrt31.u-paris10.fr/index.php?post/2009/03/08/Les-instances-de-formation-dans-le-football-professionnel-fran%C3%A7ais-%3A-quelle%28s%29-logique%28s%29-de-fonctionnement#nb3" name="nh3" class="spip_note">3</a>].
Cela revient à se poser un certain nombre de questions relativement
simples : la première question immédiatement saillante lorsque l’on
analyse la production des footballeurs d’élite est : comment sont formés
les footballeurs professionnels ? De cette question initiale découle un
ensemble d’interrogations : existe-t-il des structures spécifiques qui
prennent en charge l’apprentissage des joueurs ? A quel âge y
entre-t-on ? Pour y faire quoi ? Quels sont les débouchés ? Quel nombre
de jeunes cela concerne-t-il ?
Ce qui frappe immédiatement lors d’une première analyse est la
multiplicité des voies possibles dans l’accès au haut niveau. Jusqu’à
l’âge de dix ans, le jeune football évolue généralement dans une
structure unique : le club amateur. La diversification des voies
possibles coïncide avec l’entrée au collège. Dès l’âge de onze ans, ce
sont globalement quatre voies qui s’ouvrent au jeune : l’amateurisme, la
branche fédérale, scolaire ou professionnelle. Voici globalement les
parcours possibles lors de la phase de préformation :
<br /><img class="spip_puce" src="http://netx.u-paris10.fr/afsrt31/puce.gif" alt="-" border="0" /> Club amateur (amateur)
<br /><img class="spip_puce" src="http://netx.u-paris10.fr/afsrt31/puce.gif" alt="-" border="0" /> Classe à Horaires Aménagés (Scolaire)
<br /><img class="spip_puce" src="http://netx.u-paris10.fr/afsrt31/puce.gif" alt="-" border="0" /> Section Sportive Scolaire probatoire, locale ou régionale (Scolaire)
<br /><img class="spip_puce" src="http://netx.u-paris10.fr/afsrt31/puce.gif" alt="-" border="0" /> Section sportive « élite » (Professionnel et Scolaire)
<br /><img class="spip_puce" src="http://netx.u-paris10.fr/afsrt31/puce.gif" alt="-" border="0" /> Centre de préformation des clubs professionnels (Professionnel)
<br /><img class="spip_puce" src="http://netx.u-paris10.fr/afsrt31/puce.gif" alt="-" border="0" /> Centre de préformation fédéral (Fédéral)
<br /><img class="spip_puce" src="http://netx.u-paris10.fr/afsrt31/puce.gif" alt="-" border="0" />
Centre de perfectionnement des moins de treize ans (Fédéral et Amateur)
Les parcours dans ces différentes structures peuvent se combiner ou
s’emprunter de manière unique et totale. Il en est ainsi du club amateur
qui peut être le seul support de la formation mais également
possiblement couplée avec les sections scolaires, le centre de
préformation fédéral ou les centres de perfectionnement. Pour l’ensemble
des structures, les jeunes peuvent rester dans leur club d’origine et
continuent de loger chez leurs parents. Nous pourrions avancer qu’ils ne
reçoivent qu’un complément de formation footballistique. Cela est
différent pour la section sportive « élite » où les jeunes se licencient
au club professionnel et sont généralement logés dans les installations
du club ; mais également pour le centre de préformation fédéral -
généralement appelé pôle espoir - où les jeunes peuvent conserver leur
inscription à leur club d’origine mais où ils logent et évoluent toute
la semaine dans les locaux du pôle. Lors de l’entrée en lycée, pour les
jeunes de 15 ans et plus, le nombre de structures possibles diminue. Ne
sont alors envisageables que trois parcours : le club amateur, la
section scolaire ou le centre de formation d’un club professionnel.
Quantitativement, en ce qui concerne la région Nord / Pas de Calais ce
sont près de 1900 jeunes qui transitent dans les sections scolaires
(collèges et lycées), 80 dans les sections élite, 40 dans le centre de
préformation fédéral et une cinquantaine dans les centres de
perfectionnement des moins de 13 ans.
Cela permet de faire la synthèse entre les discours valorisant la
surpuissance des centres de formation et ceux prônant la variété des
parcours possibles. Ces discours ne se placent en effet pas sur le même
registre de développement (préformation ou formation) ni sur les mêmes
tranches d’âges. Si les centres de formation des clubs professionnels
apparaissent comme la voie quasi-inévitable pour amener au contrat
professionnel - il faudrait également interroger cela puisque, même si
cette proportion tend à augmenter chaque année, Didier Demazière et
Benoit Csakvary [<a href="http://afsrt31.u-paris10.fr/index.php?post/2009/03/08/Les-instances-de-formation-dans-le-football-professionnel-fran%C3%A7ais-%3A-quelle%28s%29-logique%28s%29-de-fonctionnement#nb4" name="nh4" class="spip_note">4</a>]
notent que seuls 90% des professionnels passent par les centres de
formation - il convient de questionner la surabondance de structures à
l’entame de la carrière de joueur.</p>
<p class="spip"><em class="spip">Des logiques de fonctionnement
différentes pour tenter d’expliquer la multiplication des structures de
formation dans le football.</em></p>
<p class="spip">Dès lors, pourquoi assiste-t-on à une telle
multiplication des structures ? Chacune d’entre elles se devrait de
posséder des caractéristiques propres la différenciant de ses voisines.
Les académies de football répondraient alors à une logique
entrepreneuriale axées à la fois sur le football et l’entreprise. L’Etat
(section scolaire) répondrait davantage à une logique éducative demain.
La position des clubs professionnels (centre de préformation et de
formation) serait plutôt celle d’une logique compétitive où l’accent
serait mis en priorité sur les résultats sportifs. La logique
paternaliste correspondrait davantage au comportement de la Fédération
(pôle espoir) en espérant former un footballeur français de très bon
niveau se sentant redevable des instances de formation nationale et, de
fait, désireux de rester dans le championnat de France. Le
fonctionnement du club amateur (centre de perfectionnement) se
rapprocherait davantage de la logique désintéressée. Mais les logiques
de chaque instance ne sont pas aussi tranchées. Le club amateur possède
un intérêt à montrer ses meilleurs éléments et à tisser des liens avec
le club professionnel voisin, tout comme le club professionnel possède
un intérêt à nouer un partenariat avec l’Education Nationale pour
séduire les classes moyennes et/ou améliorer son recrutement. Les
liaisons entre l’Etat et la Fédération, permettant ainsi de tenir à
distance les intentions mercantiles et libérales des clubs
professionnels, ne sont pas non plus dénuées de sens.</p>
<p class="spip"><em class="spip">Une multiplication de structures propre au football ?</em></p>
<p class="spip">La comparaison avec d’autres sports montre une évidente
particularité du football quant à l’organisation de sa formation
professionnelle. Quatre modèles peuvent ainsi se dégager :
<br /><img class="spip_puce" src="http://netx.u-paris10.fr/afsrt31/puce.gif" alt="-" border="0" /> L’organisation hyper fédéralisée de la gymnastique ou du tennis de table
<br /><img class="spip_puce" src="http://netx.u-paris10.fr/afsrt31/puce.gif" alt="-" border="0" /> L’organisation fédérale à tendance privée en athlétisme mais surtout en tennis
<br /><img class="spip_puce" src="http://netx.u-paris10.fr/afsrt31/puce.gif" alt="-" border="0" /> L’organisation fédérale de la préformation et de la formation au service de l’équipe de France puis des clubs en Volley-ball
<br /><img class="spip_puce" src="http://netx.u-paris10.fr/afsrt31/puce.gif" alt="-" border="0" />
L’organisation fédérale de la préformation au service des clubs et de
l’équipe de France en Basket-ball.
Il ne s’agit que d’une première piste de comparaison, mais le football
apparaît, essentiellement dès la période de préformation, comme tiraillé
entre plusieurs logiques contradictoires. Tout se passe comme si la
surreprésentation du football au niveau national, ainsi que son impact
médiatique et économique, précipitait la mise en concurrence des
diverses instances pour obtenir un part des retombées éventuelles,
qu’elles soient éducatives, symboliques, financières, etc. Dans un
article de 2002 [<a href="http://afsrt31.u-paris10.fr/index.php?post/2009/03/08/Les-instances-de-formation-dans-le-football-professionnel-fran%C3%A7ais-%3A-quelle%28s%29-logique%28s%29-de-fonctionnement#nb5" name="nh5" class="spip_note">5</a>]
, Hassen Slimani démontre de quelle manière la fédération doit sans
cesse lutter pour tenter de conserver une certaine forme de domination
sur le monde du football. En instaurant dans un premier le principe de
la formation puis, à l’aune des années 90, celui de la préformation.</p>
<p class="spip"><em class="spip">Conclusion : l’existence d’un parcours optimal ?</em></p>
<p class="spip">En imaginant que l’efficacité d’une structure soit
directement dépendante de deux facteurs - à savoir l’exigence des
procédures de sélection et le nombre de candidats retenus -, nous
pourrions supposer que les centres de préformation fédéraux seraient les
plus à même de former les meilleurs joueurs. Viendraient ensuite les
sections sportives « élite », puis les centres de préformation des
clubs, les sections sportives scolaires et enfin, pour les enfants
présentant des qualités non négligeables mais, pour autant, non retenus
dans l’une de ces voies spécifiques, les centres de perfectionnement des
différents districts. Le parcours idéal d’un futur professionnel
pourrait donc être celui-ci : section sportive scolaire pour les classes
de sixième et de cinquième, soit jusqu’à l’âge de douze ans ; ensuite,
participation à un centre de préformation fédéral dans le but de se
faire enrôler dans un centre de formation d’un club professionnel. La
signature du premier contrat professionnel représente l’étape ultime
d’un tel cheminement.
Un footballeur se doit donc de réussir au mieux les différentes étapes
qu’il se voit proposer pour réussir une carrière : la préformation, la
formation, le premier contrat professionnel, le second contrat
professionnel. Mais cela n’est pas aussi évident. Il lui faut tout
d’abord naviguer entre les différentes instances existantes et se frayer
le chemin qui lui correspond le mieux. Il se doit également de faire
état de compétences certaines dans de multiples domaines. Il sera évalué
lors de son parcours sur son physique, sa technique, sa technique au
service du jeu, sa tactique, son rendement dans le collectif et sur son
mental. Ces éléments, aisément identifiables, objectivables, mesurables,
et globaux en début de parcours se révèlent de plus en plus fins,
critériés, subjectifs et difficilement identifiables.</p>
</div>
<div class="notes"><p class="spip_note">
[<a href="http://afsrt31.u-paris10.fr/index.php?post/2009/03/08/Les-instances-de-formation-dans-le-football-professionnel-fran%C3%A7ais-%3A-quelle%28s%29-logique%28s%29-de-fonctionnement#nh1" name="nb1" class="spip_note">1</a>]
Chovaux, O., (2001). « Football minier et immigration. Les limites de
l’intégration sportive dans les années trente » in STAPS, 3, n°56, pp
9-18.</p>
<p class="spip_note">[<a href="http://afsrt31.u-paris10.fr/index.php?post/2009/03/08/Les-instances-de-formation-dans-le-football-professionnel-fran%C3%A7ais-%3A-quelle%28s%29-logique%28s%29-de-fonctionnement#nh2" name="nb2" class="spip_note">2</a>]
Plus d’une vingtaine d’entretiens menés auprès des différents acteurs
de la formation au métier de footballeurs dans la région Nord /
Pas-de-Calais. CTR, CTD, Directeur de centre de préformation, directeurs
de centres de formation, enseignants, éducateurs, recruteurs, etc.</p>
<p class="spip_note">[<a href="http://afsrt31.u-paris10.fr/index.php?post/2009/03/08/Les-instances-de-formation-dans-le-football-professionnel-fran%C3%A7ais-%3A-quelle%28s%29-logique%28s%29-de-fonctionnement#nh3" name="nb3" class="spip_note">3</a>] Goffman, I., (1963, 1975). Stigmate. Les usages sociaux des handicaps. Paris, Les Editions de Minuit, 180 pages.</p>
<p class="spip_note">[<a href="http://afsrt31.u-paris10.fr/index.php?post/2009/03/08/Les-instances-de-formation-dans-le-football-professionnel-fran%C3%A7ais-%3A-quelle%28s%29-logique%28s%29-de-fonctionnement#nh4" name="nb4" class="spip_note">4</a>]
Demazière, D., & Csakavary B., (2002). « Devenir professionnel »
in Demazière, D., & Nuytens, W., Revue Panoramiques, n°61, pp
85-91.</p>
<p class="spip_note">[<a href="http://afsrt31.u-paris10.fr/index.php?post/2009/03/08/Les-instances-de-formation-dans-le-football-professionnel-fran%C3%A7ais-%3A-quelle%28s%29-logique%28s%29-de-fonctionnement#nh5" name="nb5" class="spip_note">5</a>]
Slimani, H., (2002). « Le système de formation à la française » in
Demazière, D., & Nuytens, W., (2002). Panoramiques. Un monde foot,
foot, foot. Corlet, 160p.</p>
</div>LES « VIOLENCES SPORTIVES » : LE « BEAU CAS » DU FOOTBALL COMME PRATIQUES ET PRATIQUES DE SPECTACLEurn:md5:156012b18a0ed72d88c2b543ee2571ec2007-07-27T15:32:00+02:002011-03-07T15:34:51+01:00adminSession du RT 312006Footballviolence<p class="spip">Auteur : Williams NUYTENS</p> <p class="spip">Sérier pour limiter les contingences
Pourquoi consacrer ses activités de recherche au couple
sports-violences ? Parce qu’il procure une excitation agréable ? Parce
que nombreux sont ceux qui défendent l’idée d’une forme d’antinomie ?
Parce qu’il s’agit d’un quelque chose d’inquiétant ? Non. Voilà un objet
qui se prête admirablement au travail sociologique. Pour deux raisons
principalement. La première tient aux caractères énigmatiques de cette
curieuse association (les raisons des faits et celles de l’absence de
faits, la variation des situations...), la seconde au caractère a priori
incompréhensible des phénomènes ; car c’est bien des sports dont il
s’agit et que je sache l’immense majorité de ceux qui sont concernés par
eux ne le sont pas autour d’enjeux vitaux. Mais trêve de naïveté.</p>
<p class="spip">Les violences commises dans le monde des sports
correspondent, comme dans nombre d’autres domaines de la vie sociale, à
une grande variété d’agissements. Il peut être question d’atteintes à
l’intégrité physique, d’incivilités verbales, de comportements
homophobes et racistes, de malversations financières, de menaces avec
armes blanches. J’en passe. Je crois qu’on ne peut guère se préoccuper
sociologiquement de l’ensemble des actes dits violents, selon une
acception aussi large bien entendu, ni même de l’ensemble des éléments
qui composent les sports. Comment pourrait-on procéder pour mener
plusieurs enquêtes mais surtout pour ce qui concerne une telle étendue
de « problèmes » ? Il faut raisonnablement se concentrer sur quelques
cas, dans des univers précis, dans des situations circonstanciées. D’une
part parce que le sport n’est qu’un mot peut-on dire nous aussi : il y a
bien une constellation de sports, hétérogènes, différenciés. D’autre
part car le sport est double, pratiques et spectacles. Voilà pourquoi,
entre autres, on peut comprendre qu’amender la compréhension
sociologique des violences sportives passe par la prise en compte de
cas. Il s’agit ici de ceux qui concernent le football et que l’on
rangera dans le registre des agressions physiques.</p>
<p class="spip">Comment travailler de la sorte ? En examinant à la fois
ce qui se joue dans et autour des tribunes des grands stades et à
l’intérieur du football du dimanche. C’est que les violences -ou
agressions physiques ici- changent de forme à mesure que l’on se déplace
dans la hiérarchie des compétitions : au plus haut les dérives
produites par des franges des publics, au plus bas une multitude de
contrevenants et de victimes. Ces précautions suffisent-elles pour
produire des connaissances heuristiques ? Pour produire des
connaissances qui vont au-delà des cas retenus ? Il est délicat de
répondre maintenant ; les démons de la généralisation hantent plus ou
moins les chercheurs. Quoi qu’il en soit il fallait sérier les violences
et leurs contextes d’effectuation : par là passe la limitation des
effets de contingence ou, si on préfère mais bien que cela ne renvoie
pas au même type de biais, les effets de réel. Le choix s’est porté très
tôt sur les agressions physiques, notamment par pragmatisme. La
communication soulignera ce qui distingue, pour un même monde donc et
sur la base de plusieurs enquêtes financées (à prendre comme des cas),
ces violences relatives à l’univers de l’élite de celles enregistrées
dans les premiers échelons de l’amateurisme. </p>
<p class="spip">La diversité des violences
Expliquer et comprendre la violence, voilà deux nécessités qu’il faut
travailler et de nombreux chercheurs s’y emploient. Ils viennent
d’horizons divers ; le problème n’appartient effectivement pas
spécialement à la sociologie. Mais qu’est-ce que la violence au juste ?
Un mot certes, une catégorie qui désigne ce que Michel Wieviorka analyse
comme ce qui se crée quand le sens ne fait plus sens. Voilà pourquoi la
violence peut concerner tous les aspects de la vie sociale. N’allons
pas plus loin ici comme il faut se centrer sur ce qui touche aux
sports ; là encore l’éventail des possibles est très large.</p>
<p class="spip">Dans une étude rendue publique au premier semestre 2005,
la Ligue Internationale Contre le Racisme et l’Antisémitisme signale
qu’une commune sur deux de son échantillon fait état de problèmes liés
au racisme dans le sport. Où l’on apprend que ce phénomène concerne
toutes les régions, que le milieu rural demeure relativement épargné,
que les actes commis le sont une fois sur quatre sur le terrain et que
de nombreuses communautés sont visées. Mais les cibles ne sauraient être
les seuls pratiquants : des arbitres et des dirigeants grossissent le
rang des victimes. Si cette remarque s’applique aux cas des violences
physiques, elle intègre en outre les spectateurs des sports. On l’a vu
suffisamment avec les déplacements des supporters du football dans toute
l’Europe. Chacun se souvient ainsi des drames du Heysel au mois de mai
1985, ou encore de ce gendarme français livré aux instincts belliqueux
de fanatiques allemands en 1998. Le caractère spectaculaire de ces deux
évènements nous ferait presque oublier bien d’autres « petites
histoires » : celles des brigades italiennes de Vérone ou d’ailleurs,
celles des hooligans de Chelsea ou de Manchester United dans les années
1980, celles de Paris encore, etc. Le football n’a cessé de figurer au
premier plan pour ce qui concerne les violences physiques et de langage,
notamment parce que ses désordres changent de forme. Tout se passe
comme si de l’interdit contrôlé provenait une nouvelle transgression :
la recrudescence des rhétoriques antisémites et racistes serait ainsi le
produit d’un contrôle sécuritaire plus efficace dans les enceintes
sportives. On a pu voir ainsi, dans les rangs des supporters de la Lazio
de Rome, une croix celtique associée au mouvement white power, une
croix gammée à branches orientées vers la droite ou encore des chiffres
brandis. Le 311 nous rappelle l’influence du Ku Klux Klan (trois fois la
onzième lettre de l’alphabet), le 88 fait indirectement ressurgir le
salut hitlérien à travers le couple « hh » quand le 14 renvoie à un
slogan vantant la suprématie du blanc sur toute autre couleur. Bien sûr
les tribunes des stades présentent d’autres expressions, mais qui ne
suffisent pas à masquer nombre de dérives hétérogènes. Car nous ne
saurions réduire les violences aux messages xénophobes ou aux
échauffourées. A ce titre l’affaire Catherine Moyon de Baecque apparaît
exemplaire : l’Association européenne contre les Violences faites aux
Femmes au Travail n’a-t-elle pas demandé « la mise en place d’une
politique effective de lutte contre les violences sexuelles, sexistes et
homophobes dans le sport » ? Ces états de faits provoquent généralement
deux réactions. D’un côté regret et inquiétude se mélangent -le sport
ne devrait-il pas inculquer les « bonnes » normes de conduite ?-, de
l’autre l’indifférence prévaut. Pourquoi échapperait-il à ce qui semble
se diffuser dans toute la société ? Ces deux attitudes appellent
quelques nuances et obligent à revenir sur la complexité des relations
qu’entretiennent le sport et la violence.</p>
<p class="spip">Le football : un choix inévitable
J’évoquais plus haut l’intérêt de travailler à partir de cas, de
« penser par cas » pour reprendre Jean-Claude Passeron et Jacques Revel.
Mais qu’est-ce que cela veut dire ? Est-ce travailler à partir de
singularités, de cas atypiques, de cas exemplaires, d’exemples
extraordinaires ou ordinaires ? D’une certaine manière on ne peut pas
résoudre définitivement ces problèmes. A moins, bien sûr, de posséder
une connaissance de tous les cas. Mais le propre du travail scientifique
n’est-il pas aussi de contrer ce projet fantastique à partir d’outils,
méthodologiques et théoriques ?</p>
<p class="spip">Amender les étiologies des violences dans et autour du
sport implique par conséquent de se concentrer sur le cas : le football.
Trois raisons rendent inévitable le traitement de ce « cas ». Tout
d’abord, on ne peut traiter du sport en général : il existe des dizaines
de pratiques et de multiples modalités d’exercice se combinent. Cette
catégorisation induit une sociologie différenciée au regard des divers
« mondes ». Les pratiquants changent, le caractère juvénile ici renvoie à
une population plus adulte là, la popularité s’impose d’un côté quand
le recrutement social se resserre ailleurs. Se dessine alors un espace
complexe des cultures sportives, d’autant plus délicat à considérer dans
sa totalité que chaque pratique repose sur une histoire. Ensuite,
répétons-le, il faut à la fois tenir compte du « joueur » et du
« spectateur », « lire » les violences en distinguant ces deux parties.
Enfin, les plaintes des victimes, comme les arrêts de travail (des
arbitres, des joueurs, des dirigeants, des supporters...) et les
interventions des forces de l’ordre proviennent surtout du monde du
ballon rond. En traitant le cas du football nous limitons les
contingences, donc les erreurs car les débordements germent dans les
disciplines dites « collectives » et dans un cadre compétitif (parce que
repérable) ; le football correspond à la première pratique sportive de
ce point de vue. Il s’impose donc comme l’étalon en matière de violences
hostiles. Quant à la dimension du spectacle on sait aussi que les
déviances n’existent pas sans identification. Or c’est bien dans les
gradins des stades de football qu’elle se trouve portée à son plus haut
degré. Toutefois ces influences restent de simples adjuvants, comme la
médiatisation du reste. Pour s’en convaincre il faut se mêler aux
acteurs, les observer. C’est ainsi que l’on perçoit mieux ce qui relève
de l’intention ou de l’effectuation d’une action, de la volonté de nuire
ou de paraître, de la détermination ou du libre arbitre.</p>
<p class="spip">La violence pour la violence n’est qu’une forme de
violence
La violence n’est pas un ingrédient du supporterisme. Qu’est-ce donc au
juste ? Notons tout d’abord l’intérêt qu’il y a à distinguer ce qui
relève des équipes nationales et des clubs : nous traiterons
spécialement de ce qui se joue autour de ces derniers. Le supporterisme
renvoie à un ensemble de pratiques dont les modalités varient d’une
tribune à l’autre d’un même stade, d’une ville à une autre, d’un pays à
l’autre. L’Italie et l’Angleterre constituent néanmoins les deux
principaux foyers d’une passion du football qui se propage, se
convertit, évolue. Il existe plusieurs catégories de supporters mais on
pratique ensemble le plus souvent c’est-à-dire dans des regroupements
informels, dans des associations de type « loi 1901 » contenant du
reconnu et de l’indépendant. C’est là que se situent de ces fans
capables d’en découdre avec les forces de l’ordre, d’afficher des
appartenances politiques et/ou idéologiques, de dégrader, de proférer
des imprécations à caractère antisémite par exemple. Si ces groupes
représentent la source de risques, ils forment aussi la frange la plus
passionnée des stades. Leurs investissements sont considérables,
chronophages, économiquement coûteux. Conscients de ces sacrifices et
frustrés de ne pas peser davantage sur le destin de leur club, ces
supporters manifestent leur mécontentement lors de défaites à
répétition. Toutefois tous les débordements ne proviennent pas de
résultats sportifs médiocres : bien des violences se produisent à cause
de la concurrence qui existe entre les groupes indépendants. En effet
pour exister chaque groupe doit se montrer et participer au jeu des
provocations avant, pendant et après les rencontres. Il arrive que ceci
débouche sur une bataille rangée ; c’est le cas si un contentieux
participe de l’histoire entre deux groupes : les enquêtes montrent que
certaines interactions ne débouchent jamais sur de la violence quand
d’autres en produisent systématiquement. Il convient de tenir compte de
l’histoire des relations entre les associations, de la métamorphose des
passions causée par des défaites successives. Citons également la
consommation d’alcool par exemple, les contingences produites par le
déploiement des forces de l’ordre, le poids d’infiltrations idéologiques
radicales. Enfin n’oublions pas que recourir à « la frappe » ou aux
propos xénophobes constitue une ressource pour le contrevenant (pour
progresser dans un groupe, pour s’affirmer).</p>
<p class="spip">Différentes sont les violences commises dans le monde
des pratiquants. La première démarcation se rapporte aux niveaux dans
lesquels elles se déclarent ainsi qu’à leur « médiatisation » : au plus
haut les violences de supporters, aux bas étages des heurts plus
« variés » et occultés. Les violences du football du dimanche ne sont
donc pas seulement celles dont on parle le moins, elles concernent aussi
davantage de figures de contrevenants et de victimes (arbitres
centraux, juges de touche, joueurs, dirigeants techniques et
administratifs, spectateurs, accompagnateurs...). L’étiologie n’a pas
de centre qui s’impose entre le manque de moyens financiers et humains,
la pression des résultats, la fatigue physique, l’incompétence de
l’encadrement, l’imprécision de l’arbitrage, le repli communautaire de
certains clubs, la superficialité des relations entre les différents
acteurs d’un match. Isolément, aucun de ces adjuvants ne provoque de
débordement. La principale origine réside plutôt dans la sociologie des
licenciés d’un club et en fonction de sa situation géographique : les
clubs les plus exemplaires se trouvent en milieu rural, là où « tout le
monde se connaît ». Ainsi nous revenons sur le rôle déterminant du
contrôle social du groupe sur lui-même. La seconde différence entre le
monde du dimanche et celui du spectacle recoupe ces premières données
étiologiques. La violence des petits matchs semble encore relever du
pulsionnel, du réactif, de l’imprécision de la mise en jeu des corps,
d’un déficit d’encadrement dit « éducatif ». C’est que descendre dans
les hiérarchies sportives ne veut pas seulement dire que le spectacle
offert pâlit, que la technique régresse, que la tactique s’improvise :
les bas-fonds de la pratique contiennent plus de personnes aux cultures
sportives rudimentaires, centrées sur la situation de jeu, peu
susceptibles de rester sous contrôle lorsque contrariétés et
frustrations surviennent. Si les actes les plus violents touchent en
majorité le sous-sol du football, tous les joueurs ne sont pas des
contrevenants : moins de 1% des sanctions infligées (depuis le simple
avertissement pour un fait de jeu) correspond aux « longues
suspensions » (de six mois fermes jusqu’à la suspension « définitive »).
Pire, il semblerait qu’une partie non négligeable des fauteurs de
troubles se compose de quelques récidivistes.</p>
<p class="spip">La responsabilité du monde professionnel
Deux éléments au moins justifient l’existence de recherches consacrées
aux violences dans les sports. Le premier est d’ordre pratique : une
institution attend de connaître les causes des violences dans la
pratique sportive des amateurs. Ce faisant, je l’ai compris, on attend
de moi que je donne des solutions comme pourrait le faire une sorte de
« médecin de la société ». Ce statut rappelle celui d’Emile Durkheim en
son temps et montre toute sa modernité aujourd’hui. Je vais revenir sur
la double dimension étiologique et prophylaxique. Le second tient dans
une définition devenue classique de l’agressivité que l’on doit à Henry
Laborit, plus précisément dans son volet « de compétition » : puisque
les agressivités de compétition résultent d’un apprentissage et/ou
représentent une réponse à une forme de douleur, on peut donc les
transformer en modifiant le premier et/ou en atténuant la seconde. Les
phénomènes complexes paraissent parfois étonnamment simples.</p>
<p class="spip">S’agissant des cas liés à la pratique sportive
elle-même, les agressions instrumentales et hostiles couvrent pourtant
un large éventail de comportements, de situations de déclenchement, de
contextes de gestation. Il faut dire qu’elles se trouvent au carrefour
de nombreuses figures d’acteurs : les pratiquants, les encadrants
techniques et administratifs, les spectateurs, les arbitres. Il faut
dire aussi qu’elles se manifestent tantôt brutalement, tantôt après
plusieurs étapes et que les processus que celles-ci définissent ne sont
jamais figés. Ils peuvent même puiser leur énergie dans le passé plus ou
moins lointain des pratiquants, des arbitres, des encadrants, des
spectateurs et de toutes les relations auxquelles ils ont participé. Le
fonctionnement d’un club est forcément un système d’interactions
complexe dont il s’agit de comprendre la dynamique d’ensemble, cette
dernière pouvant être plus ou moins « criminogène » pour utiliser un
terme fort. Mais il faut encore y ajouter toutes les autres influences
possibles et risquer de compliquer un système dans lequel on n’entre pas
facilement : elles concernent les biographies des pratiquants hors les
clubs (dans leur famille, dans le système scolaire, dans le monde du
travail ou de l’hors travail...), le corps des arbitres et sa
sociologie, la mécanique des rencontres sportives avec son lot de
déterminants des agressions ( fatigue physique, provocations et
intimidations, enjeux sportifs, l’incertitude voire l’identification
lorsque les incidents trouvent leur source du côté des spectateurs). On
n’explique pas d’une seule façon les « violences » d’une part parce
qu’elles sont très diverses, d’autres part parce que leurs auteurs sont
forts différents. Il en est de même s’agissant des violences de
supporters de football ; mais des différences notables demeurent. Pour
faire court je dirai que la plus importante repose, en ne considérant
que les cas des partisans autonomes bien évidemment, sur la dimension
culturelle des affrontements. Qu’ils soient symboliques ou bien réels.
Je veux dire que les cultures supporteristes analysées contiennent la
nécessité du contentieux, l’entretiennent. Mais le cultiver peut
produire de la contingence ; c’est alors que les agissements deviennent
moins compréhensibles sociologiquement.</p>
<p class="spip">Je poserai donc pour synthétiser qu’il existe une
différence notable entre les agressions commises par les supporters de
celles que l’on observe dans la pratique du dimanche, selon les cas
retenus s’entend. D’un côté les heurts (plus ou moins organisés,
culturellement réglés...) de supporters relèvent de logiques moins
situationnelles que programmatiques, de l’autre l’essentiel des
causalités mises à jour est tout contenu dans cette fameuse image de
Hugues Lagrange : les agressions hostiles procèdent à la fois d’un
affaiblissement de la digue et d’un accroissement de la pression de
l’eau. Je terminerai en évoquant mes doutes comme mes espoirs. Je crois
indispensable effectivement d’étendre le protocole des recherches qui
sont à l’origine de cette contribution ; car il faut multiplier les
points de vue pour accéder à la compréhension du couple
sports/violences.</p>
<p class="spip">Williams NUYTENS</p>
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Glysi-Safa - CNRS/université Lyon 2</p> <div class="texte">
Téléchargez cet article : <a href="http://afsrt31.u-paris10.fr/public/congres/2006/texte_charrier.doc">Les modes d’accès féminins à l’arbitrage du football en France.</a><br /><br />
<p class="spip">Dans le contexte actuel de l’arbitrage, on traite plus
des questions autour de l’assistance vidéo ou des erreurs commises, que
la dynamique de professionnalisation en cours. Or, cette dernière
s’accompagne en France d’un phénomène a priori étonnant à savoir
l’augmentation croissante de jeunes femmes qui se lancent dans
l’arbitrage avec parfois l’intention de « faire carrière ». Leur
présence est certes minoritaire, puisqu’elles ne représentent que 2% de
l’effectif total des arbitres de football, ce qui correspond au taux de
joueuses licenciées à la Fédération Française de Football (Ministère des
sports/INSEP, 2002). Mais elle est parfois mise en évidence : lors des
Trophée du football en 2003, l’arbitre assistant primé par la F.F.F. fut
l’une des trois femmes exerçant dans les championnats masculins de
l’élite (Nelly Viennot).</p>
<p class="spip">Cette contribution porte sur l’entrée des femmes dans
l’arbitrage du football en France et les voies qu’elles empruntent pour
s’y insérer. Ces femmes sont avant tout inattendues dans ce milieu qui
passe pour être très machiste. La question centrale qui nous importe ici
est celle des modes d’accès féminins dans l’arbitrage de football. Car
les explications via une assimilation des arbitres aux joueuses ne
paraissent pas satisfaisante (Héas & alii, 2004). Nous verrons
également que le contexte qui a permis l’ouverture de l’arbitrage dans
leur direction doit être pris en considération, notamment au travers de
la professionnalisation en cours de l’arbitrage et la crise qu’il
traverse.</p>
<p class="spip">La perspective choisie est d’étudier ces modes d’accès à
partir du discours des principales intéressées. Nous avons donc été
amené à raisonner à partir de faits subjectivement vécus et rapportés.
Les modes d’entrée sont analysés sur la base des parcours et des
justifications qu’elles formulent à leur sujet, voire même de leur
motivation pour l’arbitrage. La trajectoire de ces femmes dans
l’arbitrage est - mis à part deux cas - encore en cours. C’est pourquoi
nous nous pencherons essentiellement sur les premiers temps de la
carrière, les premières étapes.
Notre questionnement se focalise sur les éléments sociologiques
expliquant conjointement pourquoi et comment ces femmes se sont tournées
vers l’arbitrage du football, en les appréhendant au travers du concept
de carrière, c’est-à-dire le résultat des interactions entre les
structures et organisations du travail (ou de l’activité plus
généralement) et les trajectoires des individus (Hughes, 1996). Ces
interactions sont particulièrement visibles lors des « turning point »,
autrement dit les changements de trajectoire.</p>
<p class="spip">Méthodologie
Notre enquête se base principalement sur une enquête de type qualitatif à
partir d’entretiens approfondis réalisées auprès de 19 arbitres
féminines en activité (hormis deux cas). Ceux-ci ont porté sur le
parcours de ces femmes dans l’arbitrage, leur perception du football et
de l’arbitrage, l’avenir qu’elles envisageaient dans cette fonction,
leurs rapports avec les autres acteurs de l’arbitrage (les arbitres
masculins, les joueurs, les joueuses, les dirigeants) et enfin leur
motivation. L’objectif était de repérer tous les éléments indicateurs
d’étapes dans leur trajectoire, de points ou d’objets de bifurcations
(l’entrée dans l’arbitrage, les changements notables comme l’engagement
dans la filière d’assistante, etc.). Nous avons aussi insisté sur les
indicateurs participant à la construction subjective du parcours et à la
part du contexte institutionnel et professionnel (évolution de
l’arbitrage, leur place par rapport aux autres acteurs de l’arbitrage,
etc.).
A notre connaissance il n’est pas fait systématiquement cas du nombre et
de la répartition des arbitres féminines en France. S’il y a des Ligues
qui fournissent des chiffres précis (nombre, niveau, ancienneté dans
l’arbitrage), d’autres sont beaucoup plus vagues . De sorte que nous
avons aussi identifié les arbitres interrogées par la technique dite de
proche en proche, consistant à demander à l’interviewé de nous indiquer
des arbitres féminines de leur connaissance (Blanchet, Gotman, 1992).
Parallèlement, nous nous sommes documenté sur l’évolution actuelle de
l’arbitrage en France, tant du point de vue des arbitres (association
comme l’Union Nationale Arbitre de Football) que de celui de la
direction du football (F.F.F.). Ceci a été complété par la consultation
de multiples articles de journaux concernant le sujet, tant dans la
presse sportive (L’Equipe, France Football) que dans la presse
généraliste nationale et régionale.</p>
<p class="spip">1. Le contexte d’arrivée des arbitres féminines.</p>
<p class="spip">1.1. L’arbitrage féminin et le système professionnel.</p>
<p class="spip">L’arbitrage est aujourd’hui sur la voie de la
professionnalisation, dans le sens où les arbitres accède à des
rémunérations qui sont parfois et pour un temps leurs principaux revenus
, mais aussi dans la mesure où ce groupe tente d’accroître son
autonomie par rapport aux autres acteurs du football, qu’il existe
aujourd’hui un travail d’amélioration et de rationalisation des savoirs
arbitraux, et qu’émerge progressivement une forme de socialisation
professionnelle, notamment lors de stage destinés aux arbitres
(Bourdoncle, 1991). De nombreux arbitres se positionnent ouvertement
pour la professionnalisation . En France, un statut juridique de
l’arbitre est en voie d’être adopté ; il vise à protéger les arbitres
des agressions dont ils sont régulièrement victimes, mais aussi à leur
fournir un statut social et fiscal (une loi est prévue dans le courant
de l’année 2006) (cabinet Leclerc de Hauteclocque, 2005).
Le mouvement est propre à l’Europe : la profession d’arbitre de football
existe en Italie, en Grande-Bretagne, en Espagne. En France, la
tendance est à la clarification de la situation des arbitres, toutes
disciplines confondues notamment par le biais de la fiscalité. Les
dernières propositions faites au Ministère de la Jeunesse, celle du
rapport réalisé par M.T. Leclerc de Hauteclocque suggère de créer une
« compagnie des arbitres » au niveau de chaque discipline, sur le mode
des moniteurs de ski. Structure extérieure et indépendante, elle serait
en charge de fournir les arbitres de la discipline rémunérés par des
honoraires versés par ces compagnies, les compagnies devenant des
prestataires de service pour les fédérations (moyennant rémunération de
la prestation). Pour les arbitres professionnels (ils sont environ 5 %
en France toutes disciplines confondues), ceux-ci bénéficieraient donc
d’un statut de travailleur indépendant.
Toutes ces évolutions sont de nature à confirmer que l’arbitrage sportif
est sur la voie de la professionnalisation. Nous assistons à la
transformation du statut « d’officiels du sport » à celui de « sportifs
professionnels » si l’on en s’en tient à la nomenclature des emplois
sportifs (Le Roux & Camy, 1997). Il apparaît que si le football est
en « première ligne », ceci est dû surtout à la place de ce sport, car
la professionnalisation touche la majeure partie des disciplines.</p>
<p class="spip">1.2. L’arbitrage confronté à la violence et à la remise en cause de sa légitimité</p>
<p class="spip">Ces changements ont aussi pour origine la clarification
du statut social de l’arbitre. Car, dans le cas du football tout
particulièrement, la violence est le problème crucial. L’UNAF (Union
National des Arbitres de Football), principale association des arbitres
de football français, a pour principale vocation d’assurer le soutien
juridique et moral des arbitres dans le cadre de leur fonction, tout
particulièrement lorsqu’ils sont victimes d’agressions physiques . Ceci
montre combien la lutte contre la violence faite aux arbitres est
fondatrice dans l’identité collective des arbitres de football. C’est
sur ce substrat qu’ils se sont organisés et qu’ils continuent à le faire
aujourd’hui. L’apparition prochaine du statut juridique de l’arbitre va
non seulement permettre de combattre plus efficacement les fautifs,
mais aussi concrétise tout ce travail des arbitres en vue de leur
reconnaissance sociale même si cela peut se construire sur une identité
paradoxale de victime potentielle.
Cependant le débat autour de l’assistance vidéo et les nouvelles
réglementations posent des questions épineuses aux arbitres français. Il
semble s’organiser une résistance sur le sujet ou qu’à tout le moins,
ils souhaitent que ces évolutions ne puissent pas se faire sans eux.
Elles révèlent qu’ils sont concurrencés, en terme de légitimité, par les
clubs, les joueurs, dirigeants, les fédérations, la presse et les
supporteurs.
En crise actuelle de légitimité, la présence des femmes dans l’arbitrage
de football apparaît aux yeux des dirigeants du football comme une
solution possible pour contribuer à atténuer la violence dans les
stades, et donc de renforcer cette légitimité égratignée. La Fédération
française, via une politique volontariste d’ouverture vers l’arbitrage
féminin dans les années 90, impulse une dynamique nouvelle, notamment
après la prise en considération du fonctionnement du football dans les
pays étrangers. Michel Vautrot, arbitre international de renom
reconverti à la F.F.F., est à l’initiative de ce mouvement. Ayant
constaté que dans les pays nordiques l’arbitrage féminin était bien plus
développé qu’en France, celui-ci a tenté de favoriser l’arrivée des
femmes dans l’arbitrage, et ce au plus haut niveau. Un recensement fut
lancé auprès des ligues, la fédération souhaitant recueillir les
candidatures de femmes susceptibles d’arbitrer au niveau fédéral, ou
plutôt celles que les directions des ligues souhaitaient présenter.
C’est par cet intermédiaire que l’arbitrage français va se doter de
trois arbitres féminines de haut niveau : Corinne Lagrande, Ghislaine
Labbé et Nelly Viennot. Elles ont en commun le fait de ne pas avoir
passé l’examen fédéral, mais une épreuve sur titre. C’est le « coup de
pouce » de la fédération qui leur a permis de pouvoir exercer au plus
haut niveau national puis international.</p>
<p class="spip">2. La problématique de l’arbitre féminine : l’étape de mise à distance par rapport à la joueuse.</p>
<p class="spip">Les arbitres féminines de football apparaissent
aujourd’hui comme une solution aux yeux des dirigeants du football
français pour endiguer quelque peu la violence sur les terrains. C’est
ce raisonnement qui a permis aux premières arbitres françaises de sortir
de l’anonymat. De manière indirecte, cette option a aussi l’avantage,
au niveau des arbitres, de préciser leur situation vis-à-vis de cette
violence, c’est-à-dire d’apparaître comme des victimes. En effet, avec
l’agression très médiatisée de Nelly Viennot en 2001, elles sont autant
susceptibles d’être victimes d’agressions au même titre que leurs
homologues masculins. Sur ce point, elles n’apportent pas de dissensions
au sein de l’arbitrage.
Cependant leur action sur le jeu est présentée de manière distincte,
aussi bien par les arbitres elles-mêmes que par les acteurs du football
(joueurs, entraîneurs, éducateurs, dirigeants). Elles perçoivent
notamment que leurs actions entraînent plus de respect des décisions
arbitrales, une atténuation de la violence, phénomène qu’observe aussi
l’entourage sportif :
« On apporte plus de respect, plus de respect sur l’arbitre. C’est même
dit par les joueurs eux-mêmes à la fin des matches. Il y a une retenue
énorme. Des fois quand il commence à s’emporter, ils disent “ vous avez
de la chance que vous soyez pas un homme, parce que sinon je vous aurais
dit vos quatre vérités ”. Puis moi j’ai l’impression qu’il a moins de
violence quoi sur le terrain, moins de contact. Moi je les sens quand on
est sur le terrain que quand c’est un homme qui arbitre.[...] Puis même
souvent les coachs après les matches viennent me dire “ ils ont été
sages, ils ont pas été violents, ils ont pas été méchants, ils ont pas
été odieux avec l’arbitre, c’est rare ... ”. » Sandrine, 27 ans, arbitre
de district, 2 ans d’arbitrage.</p>
<p class="spip">De la sorte elles se distinguent comme des agents
pacificateurs : « on fait en sorte que le match se passe au mieux, on
fait en sorte de calmer le jeu, de calmer les joueurs ». Celles qui
exercent aujourd’hui travaillent à une double mise à distance par
rapport au joueur de football. Or, toute dynamique de
professionnalisation implique une mise à distance d’un savoir profane ou
bien des pratiques propres aux professions proches, ici les
footballeurs, celles-ci se matérialisant dans l’établissement de normes
de pratiques (Hughes, 1981 ; Dubar, Tripier, 1998).
Cette mise à distance du joueur se révèle d’une part dans le fait que
nombreuses sont celles qui arbitrent dans le championnat masculin et qui
tiennent à s’y maintenir. De la sorte, elles apparaissent plus à même
de « gérer » les comportements susceptibles d’être ou de devenir
violents. Il s’agit donc là d’une « distance de genre ».
Ceci se vérifie dans le vécu des ces arbitres féminines, puisque qu’un
certain nombre d’entre elles sont amenées à gérer des situations
délicates comme des tentatives d’agression de joueur envers d’autres. Ce
fut le cas d’Héloïse qui a du s’interposer entre deux joueurs.
L’agresseur, qui venait d’être expulsé et portait alors sa tenue
civile, avait tenté de frapper un joueur adverse en rentrant sur le
terrain. Par son action, Hélène a, selon elle, dissuadé ce joueur
d’aller plus dans son agression : « il a eu apparemment des scrupules à
frapper sur une fille ».</p>
<p class="spip">D’autre part, la mise à distance de la joueuse qu’elles
ont été, c’est-à-dire la « distance de pratique », est d’autant plus
aisée que les possibilités de carrières de joueuses sont assez infimes
voire même dénigrées. De la sorte, même si certaines ont joué (et
parfois jouent encore), elles sont moins des « ex-joueuses » dans le
sens où il s’agit d’un statut difficile à maintenir dans la durée et
qu’elles le savent très tôt. En comparaison, cette référence à la vie de
joueur est mise en avant pas tous les arbitres masculins. Dans une
tribune offerte aux arbitres de Ligue 1 et 2 dans le bi-hebdomadaire
France Football, l’un d’entre eux avançait que pour régler certain
problèmes actuels de l’arbitrage, il convenait de rapprocher les joueurs
des arbitres, notamment en incitant des joueurs de haut niveau à
prendre le sifflet.
Nous avons relevé de multiples cas où les jeunes filles ont arrêté
totalement leur carrière de footballeuse (notamment par manque de clubs
féminins) avant d’investir l’arbitrage. Certaines adoptent même une
rupture totale avec le monde du football pendant quelques années ; ainsi
elles prennent pendant un temps de la distance avec cette activité,
pour ensuite entamer une carrière d’arbitre.</p>
<p class="spip">« En gros, on m’a demandé si je continuais [le
football]. J’ai dit, « non, je pense que je vais arrêter ». On m’a dit,
« c’est dommage que tu restes pas dans le foot » alors que ça fait 6 ans
que j’y étais. Et voilà. Ils m’ont dit « on a besoin d’arbitre, est-ce
que ça t’intéresse de passer d’examen ? ». J’ai dit « pourquoi pas ». »
Sandra, 26 ans, arbitre de ligue, 10 ans d’arbitrage.</p>
<p class="spip">Pour d’autres, moins nombreuses, celles qui n’ont jamais
joué au football, la prise de distance est une évidence, quelles qu’en
soit les raisons. Cela rend la carrière d’arbitre possible alors que
celle de joueuse n’a pas été envisagée :</p>
<p class="spip">« J’ai la passion du foot, en tant que supporter. Mais
je n’ai jamais joué au foot. Je ne voulais pas jouer avec les filles
[rires] ! » Séverine, 20 ans, arbitre de district, 2 ans d’arbitrage.</p>
<p class="spip">Cette distanciation de pratique, nous l’avons repéré non
seulement dans les parcours mais aussi dans la prise en compte
croissante de la règle comme motif central et même identitaire de
l’arbitrage. Ainsi, c’est souvent par la mise en exergue du règlement,
de sa maîtrise, de sa connaissance et de son application, que ces jeunes
femmes marquent une frontière avec les joueurs.</p>
<p class="spip">« Je dirais qu’entre nous on a à peu près tous les mêmes
valeurs, celui de respecter des règles, certaines règles de vie aussi.
[...] il faut s’intéresser aux règles, parce qu’il a des règles qui
changent, même les mentalités sur le stade elles évoluent. Il faut que
les arbitres s’adaptent. » Héloïse, 19 ans, arbitre de district, 1 an
d’arbitrage.</p>
<p class="spip">La séparation est telle que les joueurs sont présentés
comme des individus non seulement ignorant des règlements mais aussi peu
motivés pour développer leur savoir dans le domaine. C’est une manière
indirecte pour ces arbitres d’entériner le passage de la joueuse
qu’elles ont pu être à l’arbitre qu’elles sont aujourd’hui. Pour une
arbitre féminine expérimentée, la connaissance de la règle symbolise son
investissement dans l’arbitrage tout comme elle la sépare des joueurs :</p>
<p class="spip">« Même les joueurs ne connaissent pas les règles. C’est
comme ça. J’ai beaucoup discuté, vous savez... J’appartenais à un petit
club, dans mon petit village. On avait des réunions à l’époque, on se
retrouvait le dimanche soir, systématiquement, tous les dimanches soir,
moi je retrouvais mon équipe, une petite équipe. Et avec les joueurs, on
avait des échanges très intéressants parce que les joueurs me disaient
« on a eu un arbitre il était minable ». Je leur dis « d’abord tu as pas
le droit de dire ça. Et avant de dire qu’il était minable, explique-moi
pourquoi tu dis ça ? » Alors les joueurs commencent à m’expliquer des
situations, des faits de jeu, en me disant « il fait ci, il a fait ça,
etc. ». Je m’apercevait souvent effectivement qu’ils ne connaissaient
pas tellement les règles : « si tu avais connu les règles du jeu, tu
aurais su pour qui, pourquoi, ... ». Ca c’est positif, mais ça ne se
passe pas partout ». Ghislaine Labbé, 44 ans, arbitre internationale à
la retraite, 26 ans d’arbitrage.</p>
<p class="spip">Ce double mouvement de distanciation (de genre et de
pratique) repérable pour les femmes vient à point nommé dans un
arbitrage français en plein désarroi qui tarde à fournir une réponse à
la question de la professionnalisation ; il est donc un atout dans
l’interaction des ces femmes avec le contexte. Pour les individus, cette
double mise a distance sont deux étapes décisives dans la perception
subjective de leur carrière . Cette situation institutionnelle a permis
d’ouvrir les portes de l’arbitrage aux femmes. Il reste à voir
maintenant comment on peut catégoriser leurs modes d’accès contemporains
à l’arbitrage de football, sachant que cette prise de distance
intervient dans les deux cas mais sous des figures différentes.</p>
<p class="spip">1.4. Les deux modes d’accès observées</p>
<p class="spip">Au regard des trajectoires de carrière de ces arbitres
féminines, on rencontre deux modes d’accès. Ils traduisent l’interaction
à laquelle elles sont confrontées, entre les opportunités procurées par
la situation de l’arbitrage en France et une perception subjective de
cette activité qui ne peut plus être celle du joueur , une volonté de
construire une carrière (au sens sociologique du terme).</p>
<p class="spip">1.4.1. De la passion du football à la passion de l’arbitrage</p>
<p class="spip">Les liens passionnels avec le football apparaissent
ambigus, car ils ne se conjuguent pas complètement au passé. Tout se
passe comme s’il y avait une volonté de les maintenir a minima. Par
exemple, une arbitre féminine entraîne une équipe de jeunes dans le club
de la commune où elle réside. D’ailleurs, même si elle n’est pas
inscrite dans ce club en tant qu’arbitre, c’est dans ce dernier qu’elle
s’investit le plus, celui où elle a joué en dernier lieu. Mais, comme on
va le voir un peu plus loin, le mode d’appréhension passionnel demeure
pertinent ; c’est l’objet de la passion qui change.</p>
<p class="spip">Ce mode d’entrée dans l’arbitrage se déroule dans un
contexte institutionnel et familial qu’on ne peut éluder. La situation
institutionnelle du football féminin entraîne une tension entre le
football et l’arbitrage, qui sont aux yeux des arbitres féminines à la
fois deux activités complémentaires mais distinctes dans leurs objectifs
et exige un positionnement différent face au jeu. A leur niveau, ces
jeunes femmes se ménagent une période où les liens avec le football (en
tant que jeu) ne sont pas totalement rompus, même si la pratique de ce
sport est anecdotique, parce qu’elles ont des difficultés à tourner le
dos à la joueuse qu’elles ont été.
Dans le même temps, la relation au football est fortement marquée par
l’univers masculin qui a vu naître la passion chez ces jeunes filles.
Nous n’avons pas trouvé, dans cette génération, de militante du football
féminin, ni même de militante féministe tout court . Ceci peut
expliquer les discours dévalorisant le football féminin venant de leur
part. Ces femmes soulignent par exemple la différence de rythme au
détriment des compétitions féminines. Ce critère du rythme interdit au
football féminin d’exister de façon autonome par rapport à son homologue
masculin. Par conséquent, quand ce n’est pas la possibilité de trouver
un club et/ou une équipe de football, ce peut être tout simplement le
rejet même du football féminin qui les incite à se tourner vers
l’arbitrage.</p>
<p class="spip">J’ai commencé en fait à jouer au ballon. Disons déjà mon
père ça fait 30 ans qu’il est arbitre. Donc c’est vrai que j’ai eu le
virus dès le plus jeune âge du football. Et puis ben j’ai eu des
problèmes avec mon entraîneur. Et un jour j’étais en train, je revenais
d’un match et j’ai vu une fille arbitrer. J’ai posé carrément la
question à mon père : « papa comment il faut faire pour devenir
arbitre ? » Puis j’ai franchi les caps et je me suis mis à l’arbitrage.
J’ai arrêté de jouer au ballon et...
P.C. : Vous n’avez pas continué les deux ?
Non, non. Parce que moi j’ai eu des propositions pour continuer à jouer
dans d’autres clubs, mais sans faire des entraînements, en faisant que
des matchs et moi ça ne m’intéressait pas. Donc j’ai complètement arrêté
de jouer au ballon. [...]
P.C. : Ca n’a pas été trop dur d’arrêter ?
Ouais. Maintenant c’est vrai que ça m’a manqué mais je n’arrêterais pas
l’arbitrage pour autant. » Amandine, 29 ans, arbitre de ligue, 10 ans
d’arbitrage.</p>
<p class="spip">Ces femmes présentent le profil de personnes ayant
acquis une compétence footballistique de bon niveau et surtout contracté
une passion pour ce sport, qui va se reporter sur l’arbitrage. Ce sont
des femmes qui à un moment donné de leur carrière ont bifurqué vers
l’arbitrage, soit parce qu’elles ont été empêchées dans leur progression
de carrière dans le football mixte puis féminin, notamment en raison de
son faible développement pour le second cas, soit par choix raisonné,
celle-ci escomptant une progression de carrière satisfaisante.</p>
<p class="spip">« J’arbitre au niveau district. J’aimerai passer en
ligue l’année prochaine. On va voir. J’aimerai bien déjà arriver à la
ligue parce qu’après il y a une limite de 30 ans pour passer en
Fédération. J’aimerai faire une carrière, vraiment. De tout façon, plus
on monte, plus les matches sont un peu plus simples à gérer, donc moi
aller un peut plus haut, ça ne me dérangerait pas. Peut-être que je vais
me spécialiser ; faire les féminines ou alors les touches. [...] C’est
vrai que les féminines c’est un peu plus mou. Mais bon, s’il faut faire
les féminines uniquement pour arriver un peu plus haut, moi il n’y a pas
de souci. » Sandrine, 27 ans, arbitre de district, 2 ans d’arbitrage.</p>
<p class="spip">Cette bifurcation n’est pas toujours directe comme le
montre le cas de cette arbitre passée du football à l’entraînement puis à
l’arbitrage.</p>
<p class="spip">« J’ai joué depuis que je suis toute petite. Donc, j’ai
joué très tôt avec les garçons, après avec les filles avec une équipe de
X, quand je faisais mes études. Je suis partie en Angleterre pour mes
études. Là aussi j’ai joué. Et puis j’ai rencontré mon mari et on avait
aussi ce goût du football en général et on entraîné tout d’abord une
équipe. Donc on a passé les diplômes d’entraîneur. J’en avais passé
avant en France, le diplôme d’animateur. Là-bas on a passé l’équivalent
d’initiateur. Et puis en entraînant, donc c’était des moins de 12 ans
féminines, euh et bien là en fait j’ai eu envie de passer mon diplôme
d’arbitrage pour connaître les règles précises. Donc j’ai passé mon
diplôme. Et puis j’ai commencé à arbitrer à droite, à gauche. Et puis
j’y ai pris goût. » Christine, 37 ans, arbitre de district, 10 ans
d’arbitrage</p>
<p class="spip">D’ailleurs ce changement se présente rarement de manière
radicale. Pour illustrer les enjeux de ce « turning point » on peut
développer le cas de Sandrine. Cet arbitre de 27 ans a été confronté à
un contexte local où le football féminin était peu développé ; elle a du
construire un équipe féminine mais constate la pauvreté du
développement du football féminin. Dès avant elle avait songé à la
carrière arbitrale, voyant son avenir footballistique incertain, malgré
le fait qu’elle possède des compétence recherchées, celle d’une
gardienne de but. Cinq années plus tard, à la suite d’un rappel de cette
voie possible par un collègue, elle se lance dans l’arbitrage et espère
poursuivre une carrière au mieux au niveau fédéral, au moins au niveau
Ligue. Parallèlement il lui arrive encore de temps en temps de chausser
les crampons, même si c’est de plus en plus espacé, ces nouvelles
contraintes professionnelles lui invitant à faire des choix. Le
processus est ici assez long puisque Sandrine n’a pas totalement rompu
avec la joueuse. Mais c’est bien dans une trajectoire d’arbitre qu’elle
se situe à présent.</p>
<p class="spip">En justifiant le passage de la joueuse à l’arbitre en
raison de contraintes d’ordre externes et/ou personnelles
(entraînements, horaires, etc.) et les nouvelles opportunités qu’offre
l’arbitrage, ces arbitres trouvent un moyen de présenter un passage qui
s’effectue sans trop de heurt. Au-delà de 14 ans, les filles qui veulent
s’adonner à leur sport favori doivent faire un effort supplémentaire
par rapport aux garçons, les clubs féminins étant plus rares. Autrement
dit, il est plus malaisé pour une femme de poursuivre sa carrière de
joueuse de football et cela demande un surcroît d’investissement.</p>
<p class="spip">« Je jouais au foot avec les garçons, jusqu’à un certain
niveau, jusqu’à l’âge de 14/15 ans, parce qu’après il faut jouer avec
les filles. Et puis c’était plus loin déjà au niveau des kilomètres.
Comme il n’y avait pas beaucoup de clubs de filles, voilà. Et ça ne
m’intéressait pas donc j’ai arrêté. Je n’ai jamais essayé de jouer avec
les filles. Et du coup, sur un journal de foot j’ai vu qu’il y avait un
examen d’arbitre, et puis j’ai dit « pourquoi pas », et puis voilà ! »
Nadine, 23 ans, Jeune arbitre en Ligue, 4 ans d’arbitrage.</p>
<p class="spip">« A l’âge de 8 ans, j’ai joué au foot dans un club
masculin. Et à 14 ans, les filles n’ont plus de droit de jouer avec les
garçons. Donc il faut choisir un club féminin. A l’époque, y’avait que X
et ça m’intéressait pas du tout, surtout la mentalité. Donc, j’ai voulu
arrêter, mais en fait je ne voulais pas arrêter, je ne voulais pas
arrêter le sport. A 14 ans je ne voulais pas en redémarrer un autre que
je ne connaissais pas du tout. Et donc je me suis lancé dans l’arbitrage
comme ça, parce que je connaissais bien le règlement et que je
connaissais bien le foot. » Sylvie, 24 ans, arbitre en Ligue et N2
(féminin), 10 ans d’arbitrage.</p>
<p class="spip">Cette période qui va de 14 à 18 ans donne lieu à une
bifurcation importante dans la carrière de footballeuse, se traduisant
souvent par l’arrêt de l’activité, certaines optant parfois pour
l’arbitrage. De fait, on sépare logiquement l’organisation de
l’arbitrage des joueurs proprement dit. C’est à ce moment là de leur
trajectoire que les arbitres féminines doivent procéder à une
transformation subjective de leur passion et que l’analyse via le
concept de carrière prend tout son intérêt.</p>
<p class="spip">La force du lien avec le football est primordiale. Il
est difficile de faire des extrapolations sur le comportement des jeunes
joueuses de football qui abandonnent le football à l’âge de la
séparation fille / garçon. Cependant, on peut constater que chez celles
qui persistent dans l’arbitrage, la passion était bien ancrée. Pour
cette raison, nous pensons que la relation passionnelle au football en
général est un élément qui motive ces jeunes filles à embrasser la
fonction arbitrale, malgré les difficultés et obstacles objectifs
qu’elles n’ignorent pas. Qui plus est, par extension, l’arbitrage
devient lui-même une passion où l’on peut se projeter dans l’avenir, par
le jeu d’une mise à distance.</p>
<p class="spip">Chez les arbitres féminines entrées via ce mode d’accès,
on rencontre plus de possibilités de projection sous la forme de
carrière (au sens commun du terme) et un surcroît d’ambitions. Certaines
vont même jusqu’à faire de larges compromis comme renoncer à
l’arbitrage dans les compétitions masculines pour se construire un futur
ambitieux. On observe le même rapport entre les postes d’assistants et
ceux d’arbitres centraux.</p>
<p class="spip">« Arbitrer chez les féminines, ça m’intéresse pas. Je
n’aime pas. (...) Si on me dit aujourd’hui “ Ecoute Amandine tu peux
devenir un arbitre international, tu peux monter à haut niveau mais il
faut que tu te spécialises chez les femmes”, je réfléchirais peut-être.
Mais arbitrer en femme au niveau où je suis non. Tous les dimanches non.
Par contre si on me dit que c’est un moyen de reconversion et qu’on me
dit c’est le moyen que je monte, j’accepterais. C’est comme si on me
demande d’abandonner le centre maintenant. Si on me dit “ il faut que tu
montes mais il faut que tu arrêtes le centre ”, j’arrête les centres ».
Amandine, 29 ans, arbitre de ligue, 10 ans d’arbitrage.</p>
<p class="spip">Si la passion du football se concrétise par sa pratique,
nous avons rencontré un cas unique qui montre bien que c’est avant tout
la relation passionnelle avec ce sport qui est à l’origine de leur
investissement dans l’arbitrage. Celle-ci n’a jamais pratiqué le
football en club, ne voulant pas jouer avec des filles (le football
étant pour elle un sport d’hommes) et profitant de l’opportunité
d’arbitrer très tôt (à l’âge de 15 ans) pour exprimer sa passion du
football, qui s’exprime en parallèle dans le supportérisme. Dans le même
esprit, nous en avons croisé trois expliquant que c’est l’intérêt pour
la règle et les lois du jeu du football qui les a incitées à
s’intéresser à l’arbitrage. Or, se positionner de cette manière est bien
une façon de rester lié au football tout en prenant de la distance avec
cette pratique sportive et les joueurs.
Ainsi, ce mode d’accès l’arbitrage est bien conditionné par la capacité
de ces femmes à maintenir et transformer leur passion pour le football
en une passion pour l’arbitrage, à intimer cette trajectoire à leur
carrière.</p>
<p class="spip">1.4.2. L’arbitrage comme « loisir »</p>
<p class="spip">Le rapport de ces jeunes femmes au football est beaucoup
moins orienté en fonction de la pratique de ce sport. Nous avons
rencontré 4 arbitres que l’on peut pleinement associé à cette catégorie
de mode d’accès. Elles ont construit un rapport à la carrière arbitrale
et au football bien différent des précédentes.
Ces femmes ont pour caractéristique principale un éloignement avec le
milieu du football au point de n’avoir jamais pratiqué ce sport. De
plus, elles n’ont pas d’ascendance familiale footballistique ou bien
celle-ci est très éloignée. Le lien qu’elles entretiennent avec football
est de l’ordre du loisir ; c’est plus leur activité de spectatrice du
football qui leur a ouvert les portes de l’arbitrage que la pratique de
ce sport. Enfin, la décision d’arbitrer est présentée comme réfléchie,
donc moins soumis au contexte footballistique.
On ne trouve pas chez ces femmes la volonté affirmée de réaliser une
carrière. D’ailleurs, elles n’envisagent pas leur rapport à l’arbitrage
en terme de profession, de carrière, à l’inverse de l’autre population,
pour qui, sans que cela soit toujours une perspective absolue, il s’agit
d’une espérance certaine. On note également une moyenne d’âge plus
élevée dans cette population que dans le profil précédent. Autrement
dit, elles ne conçoivent pas l’arbitrage comme un moyen de poursuivre la
passion du football, mais plutôt comme la poursuite sous une forme
nouvelle d’une activité de loisir.</p>
<p class="spip">J’ai été voir mes premiers matches de foot, je devais
avoir 14/15 ans. J’ai bien aimé donc euh... J’y suis allée souvent avec
des hommes en fait, des copains, la famille, etc... Plutôt que de me
contenter bêtement et de pas comprendre en quoi consistaient les règles,
ben je leur demandais de m’expliquer pourquoi l’arbitre il sifflait
telle ou telle chose, qu’est-ce que c’était qu’un hors jeu, parce que
souvent les femmes elles savent pas ce que c’est qu’un hors-jeu. Et puis
voilà, j’ai toujours aimé regarder le foot, je me suis toujours
interrogée... Et puis ce qui m’a fait ressentir que j’avais un petit peu
un coté juge, c’est qu’en fait quand je regardais un match, je n’étais
pas pour une équipe, j’étais pour le beau jeu. Et puis j’en ai parlé
avec des copains - donc déjà j’ai beaucoup de copains qui font du foot -
donc forcément on en parle... (...) Et puis j’en ai parlé avec un
copain, en disant « ben tu vois arbitre ça me plairait bien », et lui il
était dans un club du Nord Isère et je me suis renseignée auprès du
président pour savoir quelles étaient les démarches, etc.. Parce que
j’avais appelé le district qui m’avait dit qu’il fallait être mandaté
par un club ». Fany, 29 ans, arbitre de district, 2 ans d’arbitrage.</p>
<p class="spip">La question de la mise à distance est appréhendée de
manière plus aisée. En effet, la passion pour le football, sans qu’elle
soit absente est bien moins viscérale. Elles ne doivent pas composer
avec la joueuse puisqu’elles ne l’ont jamais été ; de même la « distance
de genre » est bien élaborée dans le sens où elles sont enclines à
arbitrer indistinctement des compétitions masculines et féminines. Pour
cette raison aussi, elles sont plus disposées à arbitrer dans des
compétitions de niveaux moyens, voire chez les jeunes (moins de 18 ans).
On observe que l’importance accordée à la compétition arbitrée est
moins prégnante que celles de la figure de la passion. C’est que le
football et l’arbitrage ne participent que partiellement à la
construction de l’identité sociale de ces personnes à l’inverse de la
population précédente. Ainsi, il n’est pas étonnant de constater que
pour ces femmes, l’arbitrage n’est pas une fin en soi : elles envisagent
dès à présent l’arrêt de cette activité, et elles en parlent de manière
sereine, sans que cela se présente sous la forme d’une déchirure.</p>
<p class="spip">La construction de leur trajectoire de carrière (au sens
de Hughes) est orientée par le plaisir le fait de voir dans l’arbitrage
un loisir. Si bien que la progression hiérarchique au sens de
l’arbitrage revêt à leurs yeux une importance bien moindre.</p>
<p class="spip">« Je peux pas du tout espérer aller au plus haut niveau.
Mais bon il faut prendre le plaisir où il est. Et puis c’est vrai
qu’aujourd’hui on trouve des plaisirs autres que toujours aussi monter
quoi. » Caroline, 32 ans, arbitre de district, 8 ans d’arbitrage.</p>
<p class="spip">Elles expliquent qu’elles trouvent sain d’utiliser leur
temps libre du week-end à arbitrer, même si cela s’effectue dans des
conditions climatiques qui en rebuteraient plus d’un (ou une). C’est le
plaisir qu’elles trouvent à être sur le terrain qui est à la source de
leur présence. Autrement dit, cela signifie que le mode d’entrée dans
l’arbitrage peut être conditionné par l’idée que l’arbitrage demeure une
activité de loisir, certes à vocation sportive, mais où les perspective
de professionnalisation intéressent peu l’acteur. Ainsi, dans les
entretiens, la perspective de faire une carrière est éludée, sans doute
aussi parce que la plupart d’entre elles sont limitées dans ce domaine
par leur âge, mais aussi parce qu’en tant que loisir, l’arbitrage n’est
qu’une étape parmi d’autres dans leur trajectoire de loisir. Si carrière
il y a, c’est une carrière de loisir qui emprunte un temps le chemin de
l’arbitrage de football .</p>
<p class="spip">CONCLUSION</p>
<p class="spip">L’intégration de ces femmes dans l’arbitrage leur
apparaît satisfaisante, ce qui s’explique notamment par les perspectives
d’avenir réelles pour celles qui entre par le premier mode d’accès
identifié. Cette intégration est à la croisée d’une situation
institutionnelle favorable dans l’arbitrage mais aussi d’une situation
problématique dans le football féminin. L’avantage dont bénéficie les
femmes qui se lancent dans l’arbitrage tient à la mise à distance
nécessaire avec le football et qui s’impose à elles plus rapidement dans
la carrière que pour les hommes. C’est par la transformation de la
passion pour le jeu ou le spectacle footballistique en une passion pour
l’arbitrage ou un identification de l’arbitrage comme loisir que peut se
concrétiser l’implication de ces femmes.
Les modes d’accès des femmes montrent que les liens entre joueur et
arbitre ne vont pas de soi, et que c’est peut-être ce qui freine
considérablement le recrutement des arbitres dans la plupart des pays
européens. En effet, le fait de marquer une coupure avec le football
chez ces femmes afin d’envisager un avenir dans l’arbitrage les
autorisent à penser à la carrière. Le modèle de professionnalisation des
joueurs de football français (Faure & Suaud, 1999) n’est sans doute
pas celui qui s’impose pour les cas des arbitres. Et cette
professionnalisation passe peut-être par la construction d’un modèle
différent de celle des joueurs, donc d’une filière de formations
distinctes de ces derniers.
L’observation de la trajectoire de carrière de ces jeunes femmes nous
invite donc à penser l’arbitrage d’une manière bien distincte de celle
du joueur de football. Elle nous encourage aussi à étudier les arbitres
non pas seulement en tant qu’avatar du football, mais bien comme des
acteurs à part entière de ce sport.</p>
<p class="spip">Bibliographie</p>
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http://www.jeunesse-sports.gouv.fr/actualite/com/synthes_socialetfiscal_arbitre250505.pdf</p>
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