Le sport est pensé (collectivement) comme un domaine possible de spécialisation thématique pour une frange de médecins universitaires à partir des années 1920-1930. Le noyau des agents efficients en question est souvent composé d’individus en position d’attente sur un marché encombré ou en quête de positions plus prestigieuses. Ceci peut s’expliquer, entre autres, structuralement parlant, à l’aune des transformations socio-morphologiques successives qui affectent le système d’enseignement supérieur depuis la fin XIXème siècle, dans le sens où l’élargissement national du recrutement augmente et change en profondeur les conditions de compétition entre individus quasi-interchangeables. « Si nous nous spécialisons, écrit Durkheim dans la Division du travail social, en s’adressant aux économistes orthodoxes, ce n’est pas [par conséquent pour produire plus, c’est pour pouvoir vivre les conditions nouvelles d’existence qui nous sont faites. » Le champ de production hospitalo-universitaire tend ainsi à s’autonomiser tout en se divisant en autant de domaines d’action complémentaires que concurrents, entre un pôle « dominé » et un pôle « noble » (chaire clinique/chaire théorique, recherche fondamentale/recherche appliquée, etc.). Ce qui relève ou pas de la « médecine » est socio-logiquement l’un des enjeux disputés suivant des fronts de luttes orientés tout à la fois vers l’intérieur et l’extérieur des frontières de l’espace de jeu considéré. (L’étude des interfaces entre médecine et sport doit donc s’appuyer sur l’accumulation de matériaux dans chacun des champs.) Les occupants y sont amenés à développer sous ce rapport des stratégies de spécialisation par subdivision d’une spécialité déjà existante (la physiologie) ou par innovation thématique (chaires magistrales). D’où le recours à une « ressource » extra-ordinaire, adventice, comme l’exercice physique dans ses relations avec l’instauration d’un contrôle médical ou d’amélioration de la performance des sportifs, pour se démarquer et faire, le cas échéant, la différence. Et ce d’autant plus que l’accession à une chaire est un long purgatoire. Seules des ressources secondaires tirées de la clientèle privée ou une fortune personnelle peuvent permettre alors une spécialisation rare et, chemin faisant, tout en privilégiant une pratique de la recherche désintéressée avant la reconnaissance par les instances de tutelles, de se satisfaire (provisoirement) de postes subalternes. La suite de la carrière de cette fraction de médecins - investie précisément dans ce sous-secteur d’activité sociale aux frontières poreuses - montre aussi l’importance des réseaux d’influence. Mais l’analyse de telle ou telle carrière médico-sportive, qui implique l’examen de la congruence existante entre capital social personnel et conjoncture positionnelle d’insertion dans le champ hospitalo-universitaire, doit également être rapportée à l’état des rapports de force qui s’établit entre les autres agents dans le déroulement du jeu académique global. Au renouvellement des hommes s’ajoutent l’apparition de postes de chargés de cours, d’agrégés reconduits dans leurs fonctions après 10 ans d’exercice (depuis 1910), de maîtres de conférences, de professeurs adjoints (sans chaire) qui rendent possible l’intégration d’objets culturels placés au départ en marge du champ de préoccupation académique, comme le sport.