L’enquête s’appuie sur une méthode biographique basée sur 23 récits de vie (12 animatrices et 11 BEMF) et selon une approche sociologique de la construction identitaire. Elle s’articule autour de l’étude de trois processus successifs : l’engagement en formation, l’acquisition d’une place d’intervenant et les mobilités statutaires. Tout d’abord, les volontés de s’engager en formation d’animatrice ou de BEMF apparaissent comme des projets identitaires en vue de dépasser des moments critiques. L’appropriation d’une place d’animatrice ou de BEMF semble à ce titre fonctionner comme une « ressource identitaire » disponible, qui est toutefois influencée par des socialisations multiples (sportives entre autres), des contraintes et un champ d’opportunités. Nous avons catégorisé les moments critiques et les stratégies identitaires déployées par les acteurs depuis les places occupées de femme et de mère au foyer, d’assistante maternelle ou de secrétaire pour les animatrices, mais aussi à partir d’une place de sportif de haut niveau ou d’étudiant (à l’UFR STAPS notamment) pour les BEMF. Ainsi, les résultats révèlent que l’engagement en formation consiste en une stratégie de conciliation de deux figures identitaires, de substitution d’une place abandonnée ou d’un projet professionnel irréalisé, mais encore de la compensation de compétences au travail non reconnues. L’analyse de ce processus d’engagement, dont l’approche originale est transposable à n’importe quelle profession, permet de saisir avec précision les mécanismes en œuvre dans le « choix » de s’orienter dans ces professions sportives particulières. Ensuite, la réalisation du projet identitaire poursuivi par nos deux catégories d’acteurs nécessite le passage à travers un processus de conversion identitaire. Celui-ci s’articule à travers la réussite de l’étape de l’initiation et du recrutement. Les discours montrent que l’apprentissage de modèles d’intervention distincts favorise la candidature des acteurs et leur recrutement en direction d’une structure de pratique qui appartient au même monde social que l’institution dans laquelle ils ont poursuivi leur formation. Ce résultat permet ainsi d’apporter une explication nouvelle à la répartition des intervenants en gymnastiques de forme dans le secteur associatif FFEPMM et marchand. Enfin, l’évolution de l’activité d’animatrice ou de BEMF en direction d’une place d’instructrice, de responsable des professeurs ou de travailleur indépendant fut analysée sous l’angle d’un nouveau processus d’engagement. Ces mobilités statutaires apparaissent comme des ressources identitaires face à de nouveaux moments critiques. Ceux-ci se produisent dans le cadre de l’exercice d’intervention en gymnastiques de forme pour les BEMF qui deviennent responsables des professeurs ou indépendants. En ce qui concerne les animatrices devenues instructrices, les moments critiques sont relatifs à une place tenue dans la famille ou au travail. Il s’agit pour les unes de substituer la place d’animatrice dévalorisée ou un projet professionnel irréalisé à une place d’instructrice. Pour les autres, il s’agit de substituer une place de BEMF trop polyvalente à celle de responsable des professeurs ou de travailleur indépendant en gymnastiques de forme. L’étude de ce dernier processus d’engagement apporte de nouvelles connaissances sur les enjeux relatifs aux mobilités statutaires observées dans les carrières des intervenants en gymnastiques de forme.